Adolescent solitaire et complexé par son obésité, Terri (Jacob Wysocki), 15 ans, évolue dans un monde à part dans son pyjama dont il ne se sépare jamais, chez lui, au lycée, dans les bois… Il vit chez son oncle atteint de la maladie d’Alzheimer dont il s’occupe. Sujet à moqueries, méprisé et diminué par ses camarades, il n’attend plus rien de la vie. Il ne se fait plus d’illusion. Il passe outre. Résigné. L’amitié inattendue qui va se nouer entre lui et Mr Fitzgerald (excellent John C. Reilly), proviseur adjoint du lycée aux méthodes peu conventionnelles, aussi perdu que Terri, qui le prend sous son aile, va le faire changer.
Terri, deuxième film du réalisateur new yorkais, Azazel Jacobs, était présent aux festivals de Sundance, Locarno et Deauville en 2011. Influencé par John Hughes, maître du « Teen-Movie » des années 80 (Breakfast Club (1985), Une créature de rêve (1986), Un Ticket pour deux (1987), il nous offre ici un film original et touchant. Un film à l’ambiance inattendue qui déjoue la facilité des clichés du genre avec une intelligence rare. Les personnages sont singuliers et les situations jamais convenues. Une grâce fragile donne le charme à cette histoire où le temps semble suspendu.
Le film gagne son originalité grâce au talent incroyable de Jacob Wysocki qui, dans le rôle-titre, parvient, avec son humour à froid, son sourire las et douloureux et sa placidité à toute épreuve à nous faire surfer sur les genres. Sa nonchalance cache une ironie rebelle. A la fois noir et poétique, ce portrait d’un jeune inadapté social qui, contre toute attente, sort de sa solitude au fil de sa relation paternelle et sincère qu’il développe avec son proviseur adjoint, captive et séduit. Le spectateur découvre l’évolution du personnage principal en même temps que lui dans le film. Le handicap est tempéré par la douceur du regard du cinéaste et la maturité de son personnage.
Une histoire qui traite non seulement de la difficulté d’être différent mais aussi de l’apprentissage difficile de la « norme » et de la maturité. On pense bien évidemment au cinéma de Todd Solondz (Bienvenue dans l’âge ingrat, 1996), le cynisme en moins.
La finesse d’observation et la justesse de ton, font de ce film une fable drôle et sensible entre le rêve et la réalité. La magie opère !
Steve Le Nedelec
Terri, un film de Azazel Jacobs, avec Jacob Wysocki, John C. Reilly, Olivia Crocicchia, Bridger Zadina, Creed Bratton, Justin Prentice. Scénario : Patrick Dewitt d’après une histoire de Patrick Dewitt & Azazel Jacobs. Photo : Tobias Datum. Montage : Darrin Navarro. Musique : Darrin Navarro. Producteurs : Alison Dickey, Hunter Gray, Lynette Howell, Alex Orlovsky. Production : Periscope Entertainment – KnowMore Productions – Silverwood Films – Verisimilitude. USA. 2011. Format image : 1,85 :1. Couleur. Dolby Digital. DTS. Distribution (salles, France) : Pretty Pictures.