Présentation et programme
Festival de la Cinémathèque : Sans la connaissance de notre passé, notre futur n’a aucun avenir. C’est pourquoi le passé est un présent pour demain.
Le Festival de la Cinémathèque (ex Toute la mémoire du monde), le Festival international du film restauré fête ses 11 ans avec une riche sélection de restaurations prestigieuses accompagnées d’un impressionnant programme de rencontres, de ciné-concerts et de conférences.
Avec des films beaux et fragiles, la Section Raretés des Collections, propose une plongée inédite au cœur des collections de la Cinémathèque française, pour nous raconter la vulnérabilité du monde et des hommes.
Dans une démarche de sauvegarde patrimoniale mais aussi afin d’offrir un regard nouveau et curieux, sur des œuvres souvent rares et fragiles, la Cinémathèque française s’engage dans la restauration de films devenus quasi invisibles. Partagée avec d’autres cinémathèques du monde, cette vocation encourage de nombreuses collaborations.
Ainsi, la Cinémathèque française et la Cinémathèque suisse ont restauré La Vase, à partir d’une copie unique et particulièrement abîmée de sa collection. Avec la Cinémathèque Afrique de l’Institut français, la Cinémathèque française a restauré deux films malgaches, L’Accident et Tabataba. Dans le cadre de l’exposition Objectif mer : l’océan filmé, conçue par le Musée national de la Marine et dont la Cinémathèque française est partenaire, seront projetés deux longs métrages emblématiques : Vent debout (1922) de René Leprince et la version courte de Surcouf (1924) de Luitz-Morat. Parmi les trésors de la Cinémathèque, Conte Cruel (1928) de Gaston Modot, est certainement l’un des films les plus étranges.
Le Festival de la Cinémathèque est donc une occasion magnifique et unique de faire revivre ces images tournées par des artistes qui n’ont cessé de contribuer aux renouvellements des formes cinématographiques tout en offrant un regard critique sur une humanité parfois cruelle et dans le même temps, le témoignage unique d’une époque.
Vent Debout (1922) de René Leprince, d’après le roman Vent debout de Frédéric Causse – 85 mn – Avec Léon Mathot, Madeleine Renaud, Maurice Touzé, Robert Tourneur…
Le banquier Averil se suicide après un scandale financier. Son fils, Jacques, ruiné, s’engage sans hésiter comme matelot sur un Terre-Neuvien. L’équipage, mené par un certain Menzi, tente de le supprimer. Il triomphe de tous les traquenards et finit par prendre le commandement du navire mais un accident atroce lui enlève le seul être qu’il aime, Guillot le petit mousse….
Vent debout marque l’un des plus grands rôles de Léon Mathot et les débuts de Madeleine Renaud dans un drame de la mer qui suit les aventures d’un fils de banquier, engagé comme matelot sur un terre-neuvier.
Restauration 4K par la Cinémathèque française en 2022 au laboratoire Hiventy, à partir des copies nitrate teintées et virées issue de ses collections. Accompagnement musical par Sylvain Barou, Laura Perrudin et Antoine Lahay. La projection de Vent Debout sera précédée de celle du court-métrage documentaire La Pêche à la morue à la ligne de fond en Islande (1911) de Jean Nédélec.
La Pêche à la morue à la ligne de fond en Islande (1911) de Jean Nédélec – 6 mn.
Au printemps, les morues viennent déposer leurs œufs sur des bancs caillouteux situés au large de l’Islande. La Pêche à la morue à la ligne de fond en Islande est un court-métrage documentaire passionnant, remémorant l’univers fascinant des ports français d’un autre temps. Restauration 4K par la Cinémathèque française en 2023 au laboratoire Hiventy, à partir du négatif original issu de ses collections. Accompagnement musical par Sylvain Barou, Laura Perrudin et Antoine Lahay.
Conte cruel (1928) de Gaston Modot, d’après la nouvelle La Torture par l’espérance de Villiers de l’Isle-Adam – 26 mn – Avec Gaston Modot.
L’évasion d’un homme, sous l’Inquisition espagnole. Unique réalisation de l’acteur Gaston Modot, le récit impitoyable du conte de Villiers de L’Isle-Adam se pare des plus beaux atours du fantastique, dans les décors naturels du Mont Saint-Michel. Parmi les trésors de la Cinémathèque, Conte Cruel (1928) de Gaston Modot, est certainement l’un des films les plus étranges. Avec cette unique réalisation dans sa carrière, Gaston Modot (acteur dans L’Âge d’or, Fièvre et La Règle du jeu) révèle, sans concession, son goût pour les personnages inattendus et les histoires improbables. Restauration 4K par la Cinémathèque française en 2023 au laboratoire Hiventy, à partir du négatif original issu de ses collections. Accompagnement musical par Mocke. La projection de Conte cruel sera accompagnée de celle de Fièvre (1921) de Louis Delluc.
Fièvre (1921) de Louis Delluc – 45 mn – Avec Ève Francis, Edmond Van Daële, Gaston Modot…
Dans un cabaret populaire du Vieux-Port de Marseille, le patron Topinelli et sa femme Sarah remplissent les verres des matelots. Parmi ceux-ci se trouve Militis, l’amant qui avait autrefois abandonné Sarah, avant qu’elle n’épouse Topinelli. Les filles de joie accourent, l’alcool coule à flot, l’ivresse et la fièvre montent…jusqu’à la folie. Les deux anciens amants « croient s’être oubliés, ils se retrouvent, calmes, mais la fièvre d’un soir de désordre réveille tous les appétits, les rêves, les rancoeurs de leurs partenaires… ». Louis Delluc. Un cabaret à matelots du Vieux-Port de Marseille. L’ennui, la jalousie, la solitude et le rêve, décrits dans une suite de tableaux saisissants. Avant Fièvre, le titre original du film de Louis Delluc était La Boue. Censuré, ce dernier a dû subir des coupes avant de pouvoir sortir, mais sous le nouveau titre Fièvre.
Restauration 2K en 2015 par Les Documents cinématographiques et la Cinémathèque française avec le soutien du CNC, à partir des éléments conservés et sauvegardés par la Cinémathèque française. Accompagnement musical par Mocke.
Tabataba (1987) de Raymond Rajaonarivelo – 80 mn – Avec François Botozandry, Lucien Dakadisy, Soatody, Rasoa, Soavelo, Philippe Nahon…
A la fin de l’année 1946, alors que couvent les évènements de 1947, à Tanala, petit village isolé dans les vallées profondes à l’est de Madagascar, l’arrivée d’un Malgache de la ville avec des idées nouvelles va venir perturber la vie bucolique des paysans et installer la division. Il faut désormais combattre les Blancs et obtenir l’indépendance. Pour les villageois, la rébellion va prendre différentes formes, il y a ceux qui croient au pouvoir démocratique et ceux qui croient au pouvoir des armes pour s’affranchir de la domination de la France. Mais l’insurrection aura la même issue pour tous : un drame pour le village.
À Madagascar, les événements de la révolte de 1947 contre la colonisation française, vus à travers les yeux d’un jeune garçon. L’auteur y traite frontalement de l’injustice, et de la violence qui en découle, à travers le sujet trop souvent tabou de la colonisation. Premier film malgache présenté au Festival de Cannes, Tabataba a été sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs. Il a également obtenu le prix du Jury au Festival du film de Taormine en 1989, ainsi que le prix de la meilleure première œuvre aux Journées cinématographiques de Carthage. Restauration en 2023 au laboratoire Hiventy à partir du négatif orignal 35mm et des sons magnétiques, par la Cinémathèque française, la Cinémathèque Afrique de l’Institut français et Raymond Rajaonarivelo, avec le soutien d’Hiventy (TransPerfect Media France). La projection de Tabataba sera accompagnée de celle de L’Accident (1972) de Benoît Ramampy.
L’Accident (1972) de Benoît Ramampy – 30 mn.
A Madagascar, sur la route d’Ivato, un fils à papa heurte avec sa voiture un jeune paysan qui mourra des suites de l’accident, laissant sa famille sans ressources.
À partir de ce fait divers survenu sur la route d’Ivato, avec L’Accident, rare œuvre malgache primée, l’auteur dénonce les privilèges dont bénéficie une certaine bourgeoisie malgache au détriment d’une population laborieuse et perpétuellement exploitée. L’Accident est l’une des premières productions de l’île. L’auteur y traite frontalement de l’injustice, et de la violence qui en découle, à travers le sujet trop souvent tabou de la corruption. Restauration en 2023 à partir du négatif orignal 16 mm et des sons magnétiques par la Cinémathèque française et la Cinémathèque Afrique de l’Institut français, avec l’aide de la famille de Benoît Ramampy, au laboratoire Hiventy.
La Vase (Schlamm, 1970) de Heinz von Cramer – 80 mn – Avec Eugène Ionesco.
Dans sa maison de campagne, un homme qui menait une vie bien réglée, s’enferme peu à peu dans une solitude et se laisse glisser dans une dépression suicidaire.
Eugène Ionesco, seul à l’écran, interprète le personnage de sa nouvelle, le temps d’une expérience cinématographique pour exprimer l’incommunicabilité et l’angoisse existentielle. La détresse d’un homme anéanti, agonisant, dans l’attente d’une lueur d’espoir. Véritable curiosité, cet autoportrait mélancolique saisissant est adapté d’un scénario d’Eugène Ionesco, qui tient ici son unique grand rôle au cinéma. Toujours avec la démarche anticonformiste et absurde qu’on lui connait, Eugène Ionesco met ici en scène le délabrement d’un homme face à sa décomposition inéluctable. Restauration en 2023 par la Cinémathèque française et la Cinémathèque suisse, en collaboration avec Marie-France Ionesco. Numérisation 4K et restauration image à la Cinémathèque suisse, à partir d’une copie unique 35 mm fortement endommagée, conservée à la Cinémathèque française. Son optique restauré au studio L. E. Diapason. Séance présentée par Marie-France Ionesco, Nicolas Ricordel et Noémie Jean.
Surcouf (1924) de Luitz-Morat, d’après le roman Surcouf, roi des corsaires de Charles Cunat – 40 mn – Avec Jean Angelo, Antonin Artaud, Jacqueline Blanc…
Feuilleton à succès de huit épisodes, retraçant les aventures du corsaire de Saint-Malo dans une version courte Pathé-Baby, avec Antonin Artaud. Restauration 4K par la Cinémathèque française en 2023, au laboratoire Hiventy, à partir d’une copie de travail 35 mm de la version courte Pathé-Baby conservée dans ses collections, seul élément existant du film. Les intertitres ont été allongés à partir des flash-titres. La restauration numérique a fait l’objet d’une sauvegarde argentique. Accompagnement musical par un pianiste issu de la classe d’improvisation de Jean-François Zygel.
La projection de la version courte de Surcouf sera accompagnée de celle d’une série de 6 courts métrages documentaires passionnants, remémorant l’univers fascinant des ports français d’un autre temps, encombrés de trois mâts amarrés en masse avant le départ pour le grand large, que décrit magnifiquement Pierre Loti dans son roman Pêcheur d’Islande paru en 1886 et dont l’action se situe dans la ville de Paimpol, appelée « la cité des Islandais », dans les Côtes d’Armor en Bretagne. Ici, les images témoignent aussi bien de la dure réalité d’une pêche en voie d’industrialisation que vivent les hommes sur les bateaux, que du quotidien que vivent les femmes dans les usines dans l’attente angoissante du retour des hommes sur la terre ferme.
La Pêche aux homards (1910) Anonyme – 6 mn.
Restauration 4K par la Cinémathèque française en 2023 au laboratoire Hiventy, à partir d’une copie diacétate issue de ses collections.
Départ des Terre-Neuvas (1912) de Jean Nédélec – 8 mn.
Restauration 4K par la Cinémathèque française en 2023 au laboratoire Hiventy, à partir d’une copie diacétate issue de ses collections.
La Pêche aux cordes (1923) Anonyme – 5 mn.
Restauration 4K par la Cinémathèque française en 2023 au laboratoire Hiventy, à partir d’une copie diacétate teintée et virée issue de ses collections.
Retour de la pêche à la sardine aux Sables-d’Olonne (1924) Anonyme – 3 mn.
Restauration 4K par la Cinémathèque française en 2023 au laboratoire Hiventy, à partir d’une copie diacétate issue de ses collections.
L’Industrie du hareng à Boulogne-sur-Mer (1923) Anonyme – 8 mn.
Restauration 4K par la Cinémathèque française en 2023 au laboratoire Hiventy, à partir d’une copie diacétate teintée et virée issue de ses collections.
Traversée de la Manche à la nage (1927) Anonyme – 4 mn.
Restauration 4K par la Cinémathèque française en 2023 au laboratoire Hiventy, à partir d’une copie diacétate teintée et virée issue de ses collections. Accompagnement musical des courts métrages par un pianiste issu de la classe d’improvisation de Jean-François Zygel.
Moment privilégié de réflexion, d’échange et de partage qui met l’accent sur les grandes questions techniques et éthiques qui préoccupent cinémathèques, archives et laboratoires techniques mais aussi, bien évidemment (on l’espère encore !), éditeurs, distributeurs, exploitants et cinéphiles, le Festival de la Cinémathèque, né dans le contexte de basculement du cinéma dans l’ère du numérique, propose une fois de plus, cette année encore, une programmation exceptionnelle en donnant à voir aux spectateurs les chefs d’œuvre comme les œuvres moins connues (curiosités, raretés et autres incunables) du patrimoine du cinéma. Avec toujours un élargissement « Hors les murs » dans différentes salles partenaires de la manifestation à Paris et banlieue parisienne, puis, dans la continuité du festival francilien, en partenariat avec l’ADRC (Agence nationale pour le développement du cinéma en régions), plusieurs films qui tourneront après le festival dans des cinémas en régions, pour sa onzième édition, le Festival International du film restauré, renommé cette année « Festival de la Cinémathèque », s’affirme comme étant l’immanquable rendez-vous dédié à la célébration et à la découverte du patrimoine cinématographique mondial.
Créé par La Cinémathèque française en partenariat avec le Fonds Culturel Franco-Américain et Kodak, et avec le soutien de ses partenaires institutionnels et les ayants droit essentiels aux questions de patrimoine, ce festival est incontournable pour les cinéphiles passionnés, les amoureux du patrimoine cinématographique, les archivistes, les historiens, les chercheurs et autres curieux. Riche et foisonnante, la programmation du festival nous propose un panorama très éclectique des plus belles restaurations réalisées à travers le monde et salue ainsi non seulement le travail quotidien des équipes des différentes institutions, mais nous fait également prendre toute la mesure de la richesse incommensurable de cet Art qui n’a de cesse de témoigner tout en se réinventant tout le temps.
Cinq jours durant, dans 9 cinémas (La Cinémathèque française, La Filmothèque du Quartier Latin, Le Christine Cinéma Club, L’Ecole Cinéma Club, La Fondation Jérôme Seydoux – Pathé, L’Archipel, L’Alcazar, Le Vincennes et Le Reflet Médicis) le Festival de la Cinémathèque propose cette année encore, près d’une centaine de séances de films rares et/ou restaurés présentés par de nombreux invités et répartis en différentes sections pour célébrer le cinéma de patrimoine et fêter en beauté son onzième anniversaire.
Afin de ne rien manquer de cet évènement, rendez-vous à La Cinémathèque française et dans les salles partenaires du festival du 13 au 17 mars.
Steve Le Nedelec