Jim Lacy et ses deux potes Dusty et l’irlando-mexicain Chito José Gonzalez Bustamante Rafferty sont cow-boys dans les plaines de ce qui n’est pas encore le Nevada. Lacy est intrigué par les convois de prospecteurs d’or qui traversent les terres. Ils sont attirés par un supposé gros filon, du nom de Comstock. Lacy tente de convaincre Chito et Dusty de quitter leur vie de misère et de se joindre à eux. Ils sont sceptiques d’autant plus que d’autres prospecteurs rebroussent chemin éreinté par toute cette terre bleue à extraire pour un bien maigre butin. Qu’importe, Lacy croit en sa bonne étoile. Il sauve la belle Julie en difficulté avec son attelage. Elle le surnomme Nevada et l’invite à la rejoindre à Gold Hill… C’est pour Nevada le début d’une grande aventure à problème…
Nevada est une épatante série B. Le scénario est une succession de rebondissement qui nous ramène au plaisir du spectacle pour le spectacle. Nevada est une histoire rondement menée par un vétéran du western, Edward Killy. Sa réalisation est impeccable, la position de caméra est toujours au bon endroit, la longueur de ses plans est toujours juste et sa direction d’acteurs sans failles. Il y a dans ce film un plaisir évident de raconter une histoire. Pourtant, l’année suivante et après deux autres westerns, Edward Killy mettra un terme à sa carrière de réalisateur. Il réalisa vingt-six films en dix ans, de 1935 à 1945, à la RKO où il débuta comme assistant-réalisateur au début des années 30. Il reprit son travail d’assistant et de réalisateur de 2e équipe et exerça parfois comme directeur de production aussi bien sur des longs-métrages que sur des séries TV. Curieuse carrière pour quelqu’un de particulièrement doué pour la réalisation au vu de cet excellent Nevada.
Pour Robert Mitchum, c’est le premier grand rôle seul en tête d’affiche. Il investit totalement l’écran par son jeu d’une incroyable aisance et sa nonchalance. Mitchum est à l’époque sous contrat à la RKO pour 7 ans. Avec ce film, très certainement destiné à un double programme, Mitchum confirme son extraordinaire potentiel. Il retrouve Edward Killy l’année suivante pour un autre western, A l’ouest du Pecos (West of the Pecos, 1945). A ses côtés, la blonde Anne Jeffreys incarne une banquière chanteuse de saloon ou l’inverse ! Douée pour le chant, elle avait un moment envisagé une carrière de chanteuse d’opéra avant de se tourner vers le cinéma. Après quelques séries B elle est accaparée par la télévision. Anne Jeffreys apparaît dans des séries populaires comme Bonanza, Des agents très spéciaux, L’île fantastique, Battlestar Galactica, Falcon Crest, Arabesque, Alerte à Malibu, entre autres. Son numéro chanté dans Nevada est ravissant. Graig Reynolds est le méchant classique, ambitieux, manipulateur et amoureux de la belle chanteuse, sa composition est impeccable. L’acteur est hélas mort trop tôt en 1949 dans un accident de moto, mettant ainsi un terme à une carrière qui s’annonçait prometteuse. Quant à Guinn « Big Boy » Williams, l’ami de Nevada, acteur à la carrure impressionnante, il mesurait près d’1,90 m, il est l’un des seconds rôles appréciés des westerns des années 40-50. Son ami John Wayne lui confia le personnage du lieutenant « Irish » Finn dans Alamo en 1960.
Nevada est l’adaptation d’un roman de Zane Grey, l’un des grands auteurs du western et grande source d’inspiration pour le cinéma. Ses histoires sur l’Ouest américain étaient tout autant plébiscité par les spectateurs des salles de cinéma que par ses lecteurs. Bien souvent, son nom s’étale en haut de l’affiche au-dessus du titre. Zane Grey est au western ce que Stephen King est aujourd’hui à l’horreur, une référence.
Nevada est un retour aux sources d’un Ouest idéalisé.
Fernand Garcia
Nevada est édité pour la première fois en DVD dans une édition spéciale, image et son restauré, par Sidonis/Calysta dans la collection Western de légende. En complément de programme une présentation par Patrick Brion époque l’époque, 1944, et le retour par la petite porte du western sur les écrans américains. Il revient aussi sur les deux autres versions de Nevada, une muette en 1927 avec Gary Cooper et l’autre sonore en 1935 avec Buster Crabbe (7 mn) et l’immense Robert Mitchum vu par le cinéaste (et critique) Jean-Claude Messiaen. 25 rôles de cow-boy sur près de 100 films, Mitchum est une star de l’âge d’or hollywoodienne, carrière riche et impressionnante que le cinéaste de Tir groupé évoque avec respect et admiration, voix off, texte défilant, chanson, le tout sur des photos et affiches, un moment sympathique et nostalgique. La bande-annonce américaine du film (7 mn) et une galerie de photos et d’affiches du film complète cette belle édition.
Nevada un film d’Edward Killy avec Robert Mitchum, Anne Jeffreys, Guinn « Big Boy » Williams, Nancy Gates, Richard Martin, Graig Reynolds, Harry Woods, Edmund Glover… Scénario : Norman Houston d’après le roman de Zane Grey. Directeur de la photographie : Harry J. Wild. Décors : Albert S. D’Agostino et L.O. Croxton. . Montage : Roland Gross. Musique : Paul Sawtell. Producteur : Herman Schlom. Production : RKO Radio Pictures. Etats-Unis. 1944. 60 mn. Noir et blanc. Format 1.33 :1. VOSTF. Tous Publics.