“You saved Hollywood’s ass, and you might have saved theatrical distribution. Seriously. Maverick might have saved the entire theatrical industrie.” (Tu as sauvé le cul d’Hollywood et tu as peut-être sauvé la distribution en salles. Sérieusement. Maverick a peut-être sauvé toute l’industrie cinématographique.) Steven Spielberg
En résistant aux sirènes des plateformes, Tom Cruise et Paramount, ont avec Top Gun Maverick, permis aux salles américaines de survivre après le COVID. Sans son énorme succès, les cinémas encore en activité auraient certainement mis la clé sous la porte. Sans aucun soutien financier (contrairement à la France) l’immense majorité des salles à travers le monde aurait disparu laissant derrière elle un paysage totalement sinistré. Top Gun Maverick, film a « l’ancienne », formidable grand spectacle, à bien, comme le souligne Steven Spielberg, sauvé le « cul d’Hollywood ».
Mission : Impossible – Dead Reckoning Part One, tourné en grande partie pendant la pandémie, tout comme Top Gun est un grand spectacle à “l’ancienne”. Classicisme de la mise en scène (ce qui est une qualité) et une mécanique scénariste parfaitement huilée (qui n’a que faire des injonctions sociétales). Christopher McQuarrie et Tom Cruise atteignent avec ce 7e volet de la série, initié en 1996 avec maestria par Brian De Palma, une sorte de perfection dans la narration et dans l’action.
Sous la calotte glaciaire, l’équipage du sous-marin, Le Sébastopol, effectue les derniers réglages pour la mise en route d’une arme absolue : une Intelligence Artificielle, capable d’accéder à toutes les armes et informations du monde virtuel. Sur les radars du bateau, apparaît un sous-marin « ennemi ». Il lance une torpille. C’est l’incompréhension à bord, le Sébastopol est censé être « invisible ». Le commandant et son second partagent une clé, unique moyen d’accédé à l’Intelligence Artificielle. Le Sébastopol riposte à son tour, mais le sous-marin « ennemi » ainsi que ses torpilles disparaissent des radars…
Mission : Impossible – Dead Reckoning Part One, débute comme un James Bond des bons jours. Le scénario de Christopher McQuarrie et Erik Jendresen adapte 2001: l’odyssée de l’espace (2001 : A Space Odyssey de Stanley Kubrick, 1968) sur terre. Hal agit désormais du fond de l’océan. « L’Entité » (tel est son nom) comme son illustre prédécesseur, agit hors de tout contrôle. D’une puissance de calcul inégalé, « L’Entité » est en phase de prendre le contrôle absolu de la planète. Ethan Hunt (Tom Cruise) et sa petite équipe, Stickell (Ving Rhames) et Dunn (Simon Pegg), se voit confier une nouvelle mission, récupéré les deux parties de la clé qui permettent l’accès au cerveau de l’IA. Evidemment, tout part rapidement en vrille. L’équipe de Mission : Impossible se retrouve isolé avec sur leur dos les services secrets américains, des réseaux mafieux et ceux qui ont pris fait et cause pour « L’Entité » comme le redoutable Gabriel (Esai Morales).
Cette 7e aventure de Mission : Impossible, est une véritable sarabande d’espion, de truands, de tueurs et d’assoiffés de pouvoir. Le film s’affranchit de tout discours politique, si l’équipage du Sébastopol est russe, cela n’a finalement aucune importance. Le cynisme est partout. Personne n’est tout blanc ni tout noir. L’espionnage tel que décrie par Christopher McQuarrie est le règne du mensonge du double voir du triple jeu. La géopolitique est un assemblage hétéroclite, les amis d’un moment peuvent devenir les ennemis du lendemain et vice-versa. Les apparences sont trompeuses autant dans la vie que sur les écrans, la vie n’est qu’une illusion, une manipulation. Qui cherche réellement à prendre le contrôle de « L’Entité » ? Réponse (peut-être) dans la deuxième partie.
Ethan Hunt doit combattre toute une flopée d’ennemis (dans le monde réel) et “L’Entité” dans le monde numérique. « L’Entité » clonage de HAL, renvoie aussi à un élément diabolique, l’esprit violent et harceleur de Clara (Barbara Hershey) dans L’Emprise (The Entity de Sidney J. Fury, 1982). Ethan et son équipe utilisent la toute la panoplie des techniques modernes, caméras de surveillance, identification faciale, satellites, géolocalisation, avant de se rendrent compte que tout est sous le contrôle de « L’Entité ». Il ne leur reste plus qu’à combattre l’IA avec des moyens de l’ancien temps. En ce sens, Ethan suit les conseils d’Edward Snowden à la fin de Citizenfour (de Laura Poitras, 2014), utiliser un crayon et une feuille de papier est encore le meilleur moyen d’échapper à toute surveillance.
Christopher McQuarrie maîtrise impeccablement son sujet, il rend compréhensible son postulat de départ en l’expliquant à plusieurs reprises dès l’introduction. Longue exposition qui déplace le fameux générique de Mission: Impossible à près d’une demi-heure du début. Le spectacle est sur les rails. Ethan Hunt est accompagné par une voleuse de haut vol, Grace. Parfaitement écrit et interprété avec un charme fou par Hayley Atwell, « pièce » maîtresse du film. A contrario, le personnage quasi-similaire dans la dernière aventure d’Indiana Jones paraît encore plus fade (et toujours aussi insupportable). Hayley Atwell trouve dans Mission : Impossible un rôle gratifiant. Les personnages sont parfaitement définis et surtout il participe tous au déroulement de l’action. On a droit à un retour, celui d’Eugene Kittridge (Henry Czerny) 27 ans après le premier Mission : Impossible.
Christopher McQuarrie signe avec Mission : Impossible – Dead Reckoning Part One son troisième opus de la franchise après Rogue Nation (2015) et Fallout (2018). Il prend une place de choix dans l’univers ultra-concurrentiel Hollywoodien avec son scénario d’Usual Suspect (1995), neo polar non-linéaire réalisé par Bryan Singer. McQuarrie est récompensé par l’Oscar du meilleur scénario. Collaborateur de longue date de Bryan Singer, un ami d’enfance. En 2000, il réalise son premier film, The Way of the Gun, un polar mâtiné de western en forme d’hommage au western européen et à Sam Peckinpah. A partir de Valkyrie (2008) qu’il écrit pour Bryan Singer, McQuarrie devient un collaborateur régulier de Tom Cruise. Il repasse derrière la caméra avec Jack Reacher, douze ans après sa première réalisation. Il enchaîne ensuite trois Mission : Impossible. McQuarrie participe au scénario de trois autres Tom Cruise sans les mettre en scène : Edge of Tomorrow (2014), The Mummy (2017) et Top Gun: Maverick (2022). McQuarrie est un peu l’équivalent pour Tom Cruise de ce que fut James Edward Grant pour John Wayne.
Tom Cruise est la plus grande star actuelle du cinéma hollywoodien. Un itinéraire d’une grande qualité artistique et commerciale. Il débute dans Un amour infini (Endless Love, 1981) de Franco Zeffirelli, remarqué dès son deuxième film Taps (1981) d’Harold Becker. Il fait partie de la troupe de jeunes acteurs de The Outsider (1983) de Francis Ford Coppola. Il devient une vedette avec Risky Business (1983) de Paul Brickman et puis c’est le triomphe de Top Gun (1986) de Tony Scott produit par le duo Don Simpson et Jerry Bruckheimer. Il tourne sous la direction de Martin Scorsese au côté de Paul Newman, qui décroche l’Oscar du meilleur acteur, dans La couleur de l’argent (The Color of Money, 1986), idem pour Rain Man (1988) de Barry Levinson qui rapporte l’Oscar à Dustin Hoffman. Cruise accepte des premiers rôles ou de partager l’affiche avec une star. Il poursuit avec Jack Nicholson dans Des hommes d’honneur (A Few Good Men, 1992) de Rob Reiner.
Tom Cruise accumule les succès et les bons films. Il passe à la production avec sa partenaire Paula Wagner, son ex-agent. Mission : Impossible (1996) de Brian de Palma est un triomphe avec quelques scènes devenues cultes. La franchise est lancée. Tom Cruise est une des plus grandes valeurs d’Hollywood. Il accepte de mettre sa carrière « entre parenthèses » durant deux ans pour se consacrer à Eyes Wide Shut (1999) de Stanley Kubrick. Il partage (pour la dernière fois) l’affiche de ce chef-d’œuvre avec sa compagne, Nicole Kidman. Le film de Kubrick installe Tom Cruise dans une nouvelle dimension celle du haut de gamme du film d’auteur et confirme, ce que beaucoup n’avaient pas voulu voir, qu’il est un excellent acteur, au jeu subtil et puissant. Ce que confirme sa participation à Magnolia (1999) de Paul Thomas Anderson. Il tourne sous la direction de Steven Spielberg deux classiques de la SF : Minority Report (2002) et La Guerre des mondes (War of the Worlds, 2005). Tom Cruise est profondément attaché à la salle de cinéma.
Tom Cruise, impressionne une nouvelle fois avec des cascades époustouflantes. Les séquences d’action (courses-poursuites, bagarres, fusillades, train fou, etc.) sont impressionnantes, remarquablement mises en scène sur un tempo impeccable. Christopher McQuarrie réalise avec Mission : Impossible – Dead Reckoning Part One, son meilleur film. Vivement la deuxième partie !
Fernand Garcia
Mission : Impossible – Dead Reckoning Part One, un film de Christopher McQuarrie avec Tom Cruise, Hayley Atwell, Ving Rhames, Simon Pegg, Rebecca Ferguson, Vanessa Kirby, Esai Morales, Pom Klementieff, Henry Czerny, Shea Whigham, Mariela Garriga, Indira Varma… Scénario : Christopher McQuarrie et Erik Jendresen d’après les personnages crées par Bruce Geller. Image : Fraser Taggart. Décors : Gary Freeman. Costumes : Jill Taylor. Montage : Eddie Hamilton. Thème de Mission : Impossible de Lalo Schifrin. Musique : Lorne Balfe. Producteur : Tom Cruise et Christopher McQuarrie. Production : Tom Cruise Production – Paramount Pictures – Skydance Production. Distribution (France) : Paramount (sortie le 12 juillet 2023). Etats-Unis. 2023. 163 minutes. Panavision anamorphique. Format image : 2.39 :1. IMAX. DCP. Dolby Atmos. DTS X. Tous Publics.