West Point, le général MacArthur (Gregory Peck), redevenu civil, assiste à la parade annuelle de West Point. Dans l’immense réfectoire de l’Ecole militaire, MacArthur prononce un discours sur le devoir, l’honneur et la patrie. Des années auparavant, en 1942, le général MacArthur est sur l’île de Corrigidor dans la baie de Manille aux Philippines, trois mois après l’attaque japonaise sur Pearl Harbor. Tandis que les Zéros poursuivent le bombardement de l’île. Le général MacArthur découvre l’étendue des dommages…
MacArthur devait être la « réponse » d’Universal au Patton de la 20th Century Fox. MacArthur connaît une longue gestation, il arrive sur les écrans 7 ans après le formidable film de Franklin J. Schaffner. Quoique produit par Richard D. Zanuck et David Brown après le triomphe des Dents de la mer (Jaws, 1975) et Frank MacCarthy, producteur de Patton, MacArthur, semble être une production en berne par son manque moyen, de grandes scènes de bataille et une photographie à l’esthétique télévisuelle. Joseph Sargent connaît son métier, mais ne fait pas de miracle. Il arrive à rendre le film plus riche que ce qu’il n’est en réalité. Sargent assemble des plans de guerre issus d’autres productions, des films des services de l’armée de l’époque avec ses scènes de reconstitution. L’ensemble fonctionne de manière chaotique. Le scénario avance par à-coups.
Sargent réussit un segment passionnant du film, entre documentaire et commentaire politique particulièrement étrange dans son déroulement : la signature des actes de capitulation du Japon à bord du USS Missouri. La reconstitution est soignée, Sargent et ses scénaristes reprennent le discours du général MacArthur sur l’accord. Un sentiment de malaise, d’humiliation, se dégage de cette séance de signature. Les hauts gradés l’armée américaine, les représentants des forces alliés et les soldats du cuirassé entourent la délégation japonaise dans un silence lourd. Le poids de l’histoire est parfaitement saisi par Sargent. La fin de la guerre annonce une nouvelle ère. « Je prie (.) toutes les personnes de bonne volonté à se rendre compte de l’absolue futilité de la guerre », sous couvert d’un appel à la fin des guerres, se profil un monde sous la domination des Etats-Unis. « Nous devons aller de l’avant pour préserver la paix obtenue par la guerre » et mettre les progrès scientifiques au service de l’armée.
« La guerre, ce fléau maléfique, le plus grand péché de l’Humanité, ne peut plus être maîtrisée, elle doit être abolie. Nous sommes dans une nouvelle ère » atomique. Sargent colle en fondu sur le visage de MacArthur les images d’Hiroshima et Nagasaki, l’acte de naissance de la dissuasion nucléaire. « L’Armageddon à notre porte… » une nouvelle terreur est née, qui jusqu’à ce jour n’a été utilisé que par les Américains et sur des populations civiles (Hiroshima et Nagasaki). Opérations destructrices dont la justification militaire porte encore à caution. MacArthur est un faucon, une machine de guerre, dans les décombres du Japon, il dicte un mémo pour Washington « Ils (les Japonais) devront construire un nouveau pays. Un nouveau Japon avec de nouvelles idées, en préservant les meilleurs des anciennes ». Le rouleau compresseur de l’oncle Sam est en place. MacArthur prend le Japon et impose ses vues. Ce sont les Japonais qui demandent à « renoncer à la guerre » pour ne plus connaître de Nagasaki ni d’Hiroshima. Entérinant de fait les bases américaines sur leur sol. La peur du communisme associe vainqueur et vaincu. Ce long passage sur la politique extérieure Américaine au Japon et par extension dans le reste de l’Asie (du monde) justifie à lui seul l’existence du film.
Pour incarner MacArthur, il fallait une carrure de la grande époque Hollywoodienne. George C. Scott, après avoir incarné Patton, rechigne à l’idée de reprendre du service. John Wayne refuse à son tour. L’idée de Gregory Peck est excellente, l’acteur ressemble physiquement au général MacArthur. Peck hésite avant d’accepter la proposition. Trop éloigné de la conception du monde selon MacArthur. Il se fond dans l’uniforme du général. Hélas, la dimension épique du film est réduite à peau de chagrin à des répercussions sur le jeu de l’acteur qui doit composer avec des champs de bataille inexistants et une prolifération de rétroprojections. La plus grande partie du tournage se déroule dans les studios Universal. Les reconstitutions absentent sont compensées par les actualités filmées. Malgré tout, Peck assure et parvient à rendre palpables toutes les contradictions de ce personnage complexe.
MacArthur se situe à la fin de la carrière de Gregory Peck, entre La Malédiction (The Omen, 1976) un des grands films d’horreur des années 70, réalisé par Richard Donner et l’une de ses meilleures performances Ces garçons qui venaient du Brésil (The Boys from Brazil, 1978) de Franklin J. Schaffner, réalisateur de Patton. Film où il affronte Laurence Olivier qui incarnera à son tour le général MacArthur dans Inchon de Terence Young en 1981. Dans cette dernière période, on peut retenir Le commando de Sa Majesté (1980) d’Andrew V. McLaglen et Old Gringo (1989) de Luis Puenzo.
Le scénario de MacArthur est l’œuvre de deux scénaristes, Hal Barwood et Matthews Robbins, deux collaborateurs de George Lucas et Steve Spielberg. Il décroche un prix du meilleur scénario au Festival de Cannes pour Sugarland Express (1974), le premier film (cinéma) de Steven Spielberg. Le duo retravaille quelques scènes de Rencontres des troisièmes type (Close Encounters of the Third Kind, 1977). Sur un de leur scénario, Matthew Robbins passe à la réalisation avec Covette Summer, petite comédie avec Mark Hamill et Le dragon du lac de feu (Dragonslayer, 1981), une réussite d’heroic fantasy. Artistiquement séparé de Barwood, Robbins débute une féconde collaboration avec Guillermo Del Toro, Mimic (1997), Don’t Be Afraid of the Dark (2010, réalisé par Troy Nixey), Crimson Peak (2015) et Pinocchio (2022). Robbins, ne travaille pas qu’à Hollywood, puisqu’il collabore au film français Le Concert (2009) de Radu Mihaileanu, à un film brésilien et deux indiens ! De son côté, Hal Barwood, réalise un unique et premier film Contact mortel (Warning Sign, 1985) thriller de science-fiction avec Sam Waterson, s’oriente vers le jeu vidéo sous la bannière de LucasArt et conçoit plusieurs jeux dont une série dédiée à Indiana Jones.
Après MacArthur, Joseph Sargent réalise le curieux Goldengirl (1979) où un médecin néo-nazi tente de faire de sa fille une championne olympique. Le film marque le dernier rôle au cinéma de Curd Jürgen. Après, ce succès très relatif, Sargent reprend le chemin des studios TV d’Universal. L’unique film appréciable qu’il réalisera après, En plein cauchemar (Nightmares, 1993), anthologie d’histoires horrifiques fort sympathique.
Fernand Garcia
MacArthur, le général rebelle, une édition combo (DVD + Blu-ray) d’Eléphant Films avec en complément : Une présentation du film par Florent Fourcart, spécialiste de l’histoire du cinéma. (28 minutes).
MacArthur, le général rebelle (MacArthur), un film de Joseph Sargent avec Gregory Peck, Ed Flanders, Dan O’Herlihy, G.D. Spradlin, Ivan Bonar, Ward Costello, Nicolas Coster, Marj Dusay, Charles Cyphers, Sandy Kenyon… Scénario : Hal Barwood et Matthews Robbins. Directeur de la photographie : Mario Tosi. Direction artistique : John J. Lloyd. Costumes : Larry Harmell. EX : Albert Whitlock. Coordination des cascades : Joe Canutt. Montage : George Jay Nicholson. Musique : Jerry Goldsmith. Producteurs éxecutifs : Richard D. Zanuck et David Brown. Producteur : Frank MacCarthy. Production : Universal Pictures. Etats-Unis. 1977. 130 minutes. Technicolor. Panavision. Format image : 1.85:1. 16/9e – Full HD. Son : DTS – Version originale avec ou sans sous-titres français 5.1 ou en stereo 2.0 et Version française en stéréo 2.0. Tous Publics.