J’ai longtemps confondu L’homme aux colts d’or avec L’homme au pistolet d’or où, en plus d’avoir un pistolet en or massif, le méchant Christopher Lee a un troisième téton. Évidemment, une fois qu’on a vu les deux films, on ne les confond plus. Ici, pas de troisième téton – du moins autant qu’on puisse en juger, parce qu’on n’aperçoit aucun torse nu (ce qui est de toute façon rare dans le western classique, finalement très prude, comme le cinéma hollywoodien en général – et sur IMDb le très populaire et affriolant tag « bare chested male » (mâle torse nu) ne concerne que peu de westerns – et ce sont le plus souvent les sauvages Indiens qui se promènent sans chemise…)
Les personnages de L’homme aux colts d’or montrent très peu de chair nue, voire pas du tout, ils sont tous d’une façon ou d’une autre corsetés dans leurs vêtements. Le film est sans doute plus cérébral que charnel, et l’on doit se rabattre sur les mains ou les visages si l’on veut un peu de peau à découvert. Bien sûr avec un casting de cette classe, les visages sont passionnants à regarder. Celui de Richard Widmark est le premier que l’on reconnaît : dès le générique on voit Johnny Gannon (Widmark, donc), triste et renfrogné, chevaucher à bonne distance derrière un groupe de cavaliers en route vers la petite ville de Warlock. Panique en ville : « Planquez-vous, ils arrivent ! » En effet les cowboys, mené par le malfaisant Abe McQuown (Tom Drake), sèment la terreur en tirant tous azimuts et profitent de la situation pour humilier le dernier shérif en date, qui préfère s’enfuir plutôt que d’être tué. Les bons citoyens se réunissent en comité et décident d’engager un « régulateur » : c’est Clay Blaisdell (Henry Fonda) qui débarque, flanqué de ses légendaires colts d’or (qu’on ne verra qu’à la fin) et de son fidèle ami Tom Morgan (Anthony Quinn). Blaisdell, accueilli comme le sauveur parce que très efficace contre les abus de McQuown, prédit que bientôt on le haïra pour son trop grand pouvoir. Effectivement c’est bientôt Johnny Gannon, l’ancien mauvais garçon devenu le nouveau shérif, qui doit s’opposer à la fois à McQuown et à Blaisdell pour faire respecter la loi…
C’est vrai, les éléments du scénario peuvent avoir comme un air de déjà vu, mais le film est particulièrement bien écrit. Bertrand Tavernier dans les bonus nous apprend que le scénariste, Robert Alan Aurthur, était un écrivain sophistiqué qui avait une colonne régulière dans le magazine Esquire. L’homme aux colts d’or décrit des situations et des personnages qui se révèlent riches et complexes, et l’ensemble reste passionnant sans jamais tomber dans le manichéisme.
Le réalisateur Edward Dmytryk (1908 – 1999) naît au Canada de parents ukrainiens, puis la famille s’installe en Californie. Sa jeunesse a semble-t-il été difficile (mère morte très jeune, père violent). Il fugue fréquemment, et finit par obtenir le droit de vivre seul à partir de l’âge de 15 ans. Tout en faisant de brillantes études en physique et maths (Hollywood High School puis California Institute of Technology), il entre en 1923 comme coursier à la Paramount et y devient monteur dans les années 30. Après un premier film indépendant comme réalisateur en 1935 (The hawk), il enchaîne les séries B pour la Paramount, puis pour d’autres studios (7 films pour la Columbia en un peu plus d’un an entre 1941 et 1942…) Il entre à la RKO en 1942 où ses nombreuses réalisations, toujours B, semblent gagner en épaisseur (notamment le mélo anti-nazi Hitler’s Children en 1943, les films noirs Murder my Sweet en 44 et Cornered en 45, et Crossfire en 47 qui dénonce l’anti-sémitisme).
Homme de gauche, il avait brièvement été membre du parti communiste américain en 1944-45, et se retrouve en 1947 dans le collimateur de la Commission des Activités Anti-Américaines du sénateur McCarthy. Il refuse de coopérer et devient un des « Dix d’Hollywood », condamné à six mois de prison et 500$ d’amende (pour « outrage au Congrès »). Il s’exile en Grande-Bretagne où il réalise trois films (So well remembered pour la RKO, qui rompt son contrat peu après, puis L’obsédé et Donnez-nous aujourd’hui). Il revient aux Etats-Unis, purge sa peine de prison, et finit en 1951 par accepter de témoigner devant la commission d’enquête. Il dénonce plusieurs personnes (qu’il dira être déjà incriminées de toute façon), dont son ami scénariste Adrian Scott, et les réalisateurs John Berry et Jules Dassin. Cela lui vaudra le ressentiment d’une partie de la profession et pèsera évidemment sur toute la suite de sa carrière. Sans vouloir faire de la psychanalyse de Prisunic (mais un peu quand même), on peut voir dans nombre des personnages déchirés de ses films ultérieurs les traces de ses propres angoisses de culpabilité. Ses films suivants sont plutôt de grosses productions, parmi lesquelles Ouragan sur le Caine (avec Humphrey Bogart), La Lance brisée (avec Spencer Tracy), La main gauche du Seigneur (encore avec Bogart), L’arbre de vie (avec Elizabeth Taylor et Montgomery Clift), Le bal des maudits (avec Brando, Clift et Dean Martin) et en 59 L’homme aux colts d’or, dont on vous cause ici.
Il semble admis qu’à partir de là sa carrière décline, avec par exemple un curieux remake de L’ange bleue en 60, que je n’ai pas vu mais qui n’a pas l’air terrible, ou Shalako en 68, western bizarre qui réunit Sean Connery et Brigitte Bardot. (J’ai malgré tout un bon souvenir de Mirage (1965), étrange polar où un Gregory Peck amnésique doit sauver sa vie en reconstituant son passé.) A partir de 1976, Dmytryk abandonne la réalisation et commence à enseigner le cinéma, d’abord à l’université du Texas puis (à partir de 81) à l’université de Californie du Sud (French carnet rose : Dmytryk a été marié de 1932 à 1947 à l’actrice française Madeleine Robinson et ils ont eu un fils, Michael J. Dmytryk, devenu assistant-réalisateur aux États-Unis.).
Laissons de côté le maccarthysme et son lot de mauvaise conscience (il faut dire qu’ici tous les personnages ont dans leur passé des choses à se reprocher), et revenons aux étonnements simples que nous procurent L’homme aux colts d’or. Le premier concerne les personnages de Blaisdell et Morgan et leurs relations. Si Fonda est assez égal à lui-même (c’est-à-dire grandiose d’impassibilité mystérieuse, quoique dans ce film commencent à se manifester des obscurités peut-être encore inédites dans sa carrière, notamment une cruauté latente), c’est Anthony Quinn qui hérite du rôle le plus haut en couleur : Tom Morgan, l’inséparable compagnon, est un joueur à la gâchette facile, au sourire cynique, sans scrupule, secret, au passé qu’on devine sanglant et tumultueux, qui a les cheveux blancs et surtout un imposant pied bot.
On pourrait sans doute faire une thèse sur les malformations physiques au cinéma, en particulier sur les personnages boiteux. Dans le cinéma classique hollywoodien (qui ne s’embarrasse pas toujours de nuance), quelqu’un qui boite est quelqu’un dont l’esprit aussi est boiteux. Les difformités physiques sont la projection directe des difformités morales (et puis c’est pratique, ça se voit à l’écran). La boiterie a sans doute un statut particulier parmi les handicaps, parce qu’elle affecte la marche, l’équilibre, la capacité de l’être humain à avancer et à rester debout, ce qui est censé constituer la base de la dignité humaine. En général les personnages hollywoodiens de boiteux se sont conformés à leur handicap et sont devenus socialement indignes (parmi une kyrielle d’exemples je ne citerais que le Robert Taylor de Party girl de Nicholas Ray, avocat boiteux et marron de la pègre, qui ne retrouve sa pleine intégrité morale – et l’amour de Cyd Charisse – qu’après une opération de la hanche qui le guérit de sa claudication). Tom Morgan ne déroge pas à la règle, il est aigri par son handicap, il est ami avec Clay Blaisdell parce que ce dernier « est le seul à ne pas le voir comme un estropié », tandis que Lily (Dorothy Malone), qui a semble-t-il été autrefois sa maîtresse, le traite maintenant de « sale infirme ». Le pied bot de Morgan peut d’ailleurs aussi se lire comme une image d’impuissance sexuelle, ou en tout cas de sexualité boiteuse et/ou « déviante ». Morgan et Blaisdell ont une relation qui va au-delà de la simple amitié virile. Pour un spectateur d’aujourd’hui, le sous-texte homosexuel est évident (même si Bertrand Tavernier trouve l’interprétation trop flagrante et réductrice). On voit surtout l’amour de Morgan pour Blaisdell, sa jalousie de tous ceux qui s’approchent trop, la façon dont il le protège de tout et de tous, allant jusqu’au meurtre pour enlever de sa route un potentiel gêneur. Morgan agit dans l’ombre, et Blaisdell accueille les attentions de son ami sans se poser de question. Ce n’est qu’à la toute fin que Blaisdell semble se rendre compte de l’importance qu’avait Morgan pour lui, et qu’on peut voir un homme ravagé par le chagrin de la perte. Si la relation n’est pas forcément équilibrée, les sentiments sont très forts des deux côtés. Anthony Quinn trouve là un de ses grands rôles, étonnamment sobre dans l’incarnation de ce personnage sombre et tourmenté.
La première fois que l’on voit les deux hommes, ils chevauchent vers Warlock devant un chariot portant l’enseigne du « French Palace » (puisque leur principe de fonctionnement est que pendant que Blaisdell rétablit l’ordre, Morgan achète le saloon local et installe son French Palace, tripot chic avec tables de jeux et accortes hôtesses, qui leur permet d’arrondir leurs fins de mois). Les deux hommes à cheval, bien qu’un peu poussiéreux, sont très élégants, et le resteront tout au long du film. Le mot « peacock » me vient à l’esprit à leur propos : gilets en tissus brillants, costumes parfaitement coupés, coquettes cravates, montres à gousset, ce sont de véritables paons qui se pavanent au milieu d’un parterre de cowboys crasseux (ce qui va aussi dans le sens du sous-texte gay – ainsi que leur association avec une certaine idée (plutôt marrante) du « chic français », qu’on peut imaginer porteur de notions de libertés et de libertinage). Plus tard le couple s’installe au premier étage du tripot, et Morgan peut montrer fièrement à son ami la déco qu’il a supervisée (tendance fanfreluches et mauvais goût tapageur), en plaisantant devant la plantureuse femme nue du tableau d’un Rubens de saloon.
Les colts d’or, dans leur aspect mythique de sur-virilité clinquante, participent aussi de cette imagerie gay (même s’il n’y a en réalité que les crosses qui sont en plaqué or…) Comme les difformités physiques, l’aspect phallique des colts a inspiré beaucoup de monde à Hollywood. La fille de Samuel Fuller le disait récemment à la radio à propos du western de son père Quarante tueurs : les Forty guns du titre original représentent quarante pénis, tous au service de Barbara Stanwyck, la maîtresse-femme au fouet… Ici l’impuissance auprès des femmes, ainsi que la jalousie et l’aigreur, sont du côté de Morgan (comme en atteste sa relation tordue avec Lily/Dorothy Malone, et sa façon d’éconduire la jeune entraîneuse du French Palace qui tente de se rapprocher de lui), tandis que les succès féminins et la toute-puissance sexuelle des colts d’or sont du côté de Blaisdell (qui se fiance avec la belle quoiqu’un peu falote Jessie/Dolores Michaels). La relation homosexuelle, qui paraît d’abord prise en charge essentiellement par Morgan, est finalement assumée aussi par Blaisdell, qui après la mort de son ami abandonne ses colts d’or – et sa virilité triomphante – dans la poussière, et part sans un regard pour son ancienne fiancée, vers ce qu’on imagine être à une vie de veuvage et de solitude.
Un des axes principaux du scénario est l’idée de justice, thème souvent traité dans le western mais ici brillamment développé. Si Morgan boite, c’est aussi, dans la logique foisonnante du film, parce qu’il représente une justice boiteuse. L’autre boiteux de l’histoire, c’est le juge supplétif Holloway (Wallace Ford), vieillard acariâtre arc-bouté sur une conception rigide d’une justice « pure », mais lui-même parfaitement inutile face aux exactions de la bande à McQuown. Dans tous les cas, la justice est déficiente : inopérante quand elle veut être trop intègre et trop détachée des contingences matérielles (le juge), trop agressive et tendant vers la dictature quand elle est laissée à des manieurs de colts grassement payés (Blaisdell et son bras droit – mais déficient de la jambe gauche – Tom Morgan). Quoiqu’on fasse, ça boite.
Reste le petit Johnny Gannon (Richard Widmark), le mauvais garçon repenti, un gars ordinaire qui a le courage de prendre le job de shérif et d’essayer de faire respecter une loi peut-être plus grande que lui, mais à hauteur d’homme. Lui-même sera estropié d’une autre façon : alors qu’il tente d’arrêter la violence en allant voir McQuown dans son repaire, ce dernier dans une crise de rage lui poignarde la main droite, ce qui scandalise même ses anciens compagnons d’armes, pourtant bandits endurcis (cette scène fait écho à celle, très similaire dans sa violence soudaine, de L’homme de la plaine d’Anthony Mann, tourné quatre ans plus tôt, où James Stewart se fait tirer à bout portant dans la main droite par le fils dégénéré d’un baron local, sous les yeux consternés de ses hommes de main, qui trouvent tous que leur patron va trop loin dans la cruauté gratuite.) S’attaquer à la main d’un homme, c’est s’attaquer à sa capacité à tenir une arme – ce qui dans le western peut être synonyme d’une sentence de mort. Ici Johnny Gannon se trouve privé de son pouvoir de faire respecter la loi – et c’est encore la justice qu’on mutile (le bras armé de la loi est devenu inopérant). Et il faudra le renoncement de Blaisdell pour que la forme de justice « humaine » et honnête que représente Gannon puisse s’imposer.
Si la principale histoire d’amour du film est celle qui lie Blaisdell et Morgan, d’autres romances égayent le film : tout d’abord celle, finalement très conventionnelle et hollywoodienne, entre Blaisdell (Fonda) et Jessie Marlow (Dolores Michaels), jeune blonde très classique et très comme il faut, qui commence par mépriser Blaisdell et ce qu’il représente, avant de succomber à son charme (et on la comprend). Et puis il y a aussi l’improbable histoire entre Johnny Gannon (Widmark) et Lily (Dorothy Malone), le petit cowboy poussiéreux avec sa mine de fouine morose et l’élégante hautaine à la beauté un peu artificielle, avec sa mouche sous la lèvre inférieure, dont le nom complet (Lily Dollar) est assez mystérieux puisqu’on ne voit pas trop ce qui la relie au fric (hormis ses tenues fantaisistes et sans doute dispendieuses), et qui m’évoque plutôt la Lulu Carabine d’un album de Lucky Luke. Venue pour se venger de Blaisdell (qui a jadis tué son fiancé en légitime défense), Lily change de cap quand elle commence à être séduite par la pugnacité inattendue de Gannon, seul à oser s’opposer à la fois aux bandits et au régulateur appointé. Le petit blond courageux aux yeux bleus fait fondre la belle froufroutante.
Widmark, s’il est ici un peu noyé dans la masse (face aux personnages mastodontes joués par Fonda et Quinn), n’en est pas moins formidable de simplicité et très émouvant. L’homme aux colts d’or est également une grande réussite de réalisation, et l’utilisation de l’espace dans l’écran large du Cinémascope s’y révèle particulièrement brillante (et sans esbroufe). Quand on baguenaude dans le film grâce au DVD, on ne cesse de tomber sur des mouvements de caméra discrets mais efficaces, de très beaux cadres utilisés aussi bien dans la largeur que dans la profondeur, et des chorégraphies de personnages qui soulignent avec intelligence leurs relations et leurs évolutions dans le déroulement de l’histoire. Il y a aussi nombre de belles trouvailles visuelles, jamais gratuites, comme la séquence du meurtre du barbier vers le début du film : un soir, un cowboy de la bande de McQuown se fait raser chez le coiffeur/barbier de Warlock. Le barbier, rendu nerveux par l’agressivité de l’homme et les quolibets de ses copains à l’extérieur, fait accidentellement une petite coupure à la joue du cowboy avec son rasoir. Furieux, celui-ci traîne le barbier dehors, le jette par terre contre un tonneau qui se trouve là, dégaine son arme, se ravise et monte à cheval. Le barbier soulagé se croit tiré d’affaire, mais le cowboy change d’avis et tire deux fois sur lui. Le barbier agonisant s’affale contre le tonneau, sort du cadre par le bas, révélant deux trous par lesquels s’échappent en deux jets l’eau du tonneau. Le plan suivant nous montre à droite le tonneau avec les deux jets, et au fond le passage à cheval de Johnny Gannon et de son jeune frère, Johnny atterré par ce meurtre veut descendre de cheval, son frère l’en empêche et ils partent tous les deux, ne laissant devant nous que le liquide qui continue de jaillir. Le meurtre est brutal, mais au lieu de voir du sang et un corps sans vie, on ne voit que ces jets d’eau en arc de cercle, belle image très graphique de la vie qui s’écoule.
Je dois au critique de DVDclassik d’avoir remarqué que dans une des séquences de la fin, Morgan, désespéré et ivre, se prépare à sortir devant le tableau représentant Lily (qu’il a au-dessus de son lit), en marmonnant pour lui le début du célèbre monologue de Macbeth qui vient d’apprendre le suicide de sa femme : « Tomorrow, and tomorrow, and tomorrow, /Creeps in this petty pace from day to day, /To the last syllable of recorded time… » (Demain, puis demain, puis demain /glisse à petits pas de jour en jour / jusqu’à la dernière syllabe du registre des temps…) Puis il sort dans la rue nocturne et commence à tirer sur tout ce qui bouge, pour provoquer (et éventuellement tuer) le shérif Gannon. L’évocation de la tragédie de Shakespeare pour le final de ce très beau film n’est bien sûr pas un hasard, et l’histoire de Macbeth, qui, poussé par sa femme, accède au pouvoir par le meurtre puis sombre dans la folie, a de multiples résonances avec le scénario de L’homme aux colts d’or. Morgan a des points communs avec Macbeth (goût du pouvoir, angoisses métaphysiques), mais aussi avec Lady Macbeth (comme elle, il pousse par calcul Blaisdell, son ami/amant, à tuer des gens, quitte à travestir la réalité pour arriver à ses fins – se comportant aussi comme une sorte de Iago auprès d’Othello). Ce qu’il croit voir de désamour chez Blaisdell le plonge dans la détresse et provoque la tragédie finale.
« Warlock », le titre original du film (qui est le nom de la ville), veut dire « sorcier » en anglais, et l’étymologie du mot plonge dans l’Anglais et l’Ecossais archaïques, comme l’histoire de Macbeth prend ses racines dans une Ecosse moyenâgeuse. Les sonorités entêtantes du mot « Warlock », ce qu’on peut y entendre de « war » (guerre) et de « lock » (verrou, fermeture), autrement dit de guerre privée, la poésie un peu barbare qui s’en dégage, tout cela s’ajoute à son sens premier qui nous ramène vers les trois sorcières de Macbeth, celles qui prophétisent de façon énigmatique son accession au trône puis sa mort. Je ne sais pas qui sont les sorciers dans ce film, mais tous les personnages ont leurs propres démons intérieurs et portent en eux-mêmes leurs forces d’autodestruction. La tragédie shakespearienne est peut-être une des clés intimes de ce film surprenant, qui sous les dehors d’un western policé et classique cache tout un monde de frustrations, de violences et de sauvagerie secrète.
Emmanuelle Le Fur
PS : j’ai lu que L’homme aux colts d’or était un des films préférés de Sergio Leone. On voit en tout cas d’où vient le personnage que joue Henry Fonda dans Il était une fois dans l’Ouest.
L’Homme aux colts d’or une édition Sidonis Calysta pour la première fois en combo Blu-ray-DVD (report HD magnifique) dans la collection Silver – Western de légende avec en bonus, une double présentation par Bertrand Tavernier (15 minutes) et Patrick Brion (13 minutes).
L’Homme aux colts d’or ( Warlock) un film d’Edward Dmytryk avec Henry Fonda, Richard Widmark, Anthony Quinn, Dorothy Malone, Dolores Michaels, Wallace Ford, Tom Drake, Richard Arlen, DeForest Kelley, Regis Toomey… Scénario : Robert Alan Aurthur d’après le roman de Oakley Hall. Directeur de la photographie : Joe MacDonald. Effets spéciaux optique : L.B. Abbott. Décors : Herman A. Blumenthal & Lyle R. Wheeler. Montage : Jack W. Holmes. Musique : Leigh Harline. Producteur : Edward Dmytryk. Production : 20th Century Fox. Etats-Unis. 1959. 121 minutes. Couleur. Deluxe. CinemaScope. Format image : 2.35 :1. Son : VOSTF. VO. et VF. DTS-HD. Tous Publics.