Adaptation du roman éponyme du courtier Jordan Belfort publié à sa sortie de prison en 2005, Le Loup de Wall Street, 23ème long métrage de fiction du Maître Martin Scorsese, est un biopic dramatique, un récit délirant et cynique des frasques de Belfort. Une plongée en apnée dans un univers de débauche. Après une longue bataille avec Brad Pitt, Leonardo DiCaprio est parvenu à obtenir les droits d’adaptation du roman avec l’influence déterminante qu’ont joué le nom et l’aura de Scorsese pour le porter à l’écran. Après Gangs of New York (2002), Aviator (2004), Les Infiltrés (2006) et Shutter Island (2010), Le Loup de Wall Street marque la cinquième collaboration du réalisateur avec DiCaprio, devenu, après Robert De Niro qui a tourné pas moins de huit grands films avec le réalisateur, son nouvel acteur pygmalion.
Même si tout ici prête à rire, des situations aux dialogues en passant par les personnages tous aussi pitoyables les uns que les autres, que l’on ne s’y trompe pas, entièrement au second degré, sous ses airs de comédie pour adulte, Le Loup de Wall Street déborde de colère. Plus on découvre les personnages pathétiques, plus le film est drôle. Mais l’humour est noir. Le rire n’est pas gratuit mais donne à réfléchir. Le rire grinçant provoqué par l’outrance des personnages et des situations suscite la réflexion. Il est lourd de sens et de gravité. Le travestissement de ces « Golden Boys » ne trompe pas, nous sommes bien ici en compagnie de truands. Sans concession, Scorsese dénonce ce monde pervers et malsain de la finance en utilisant magistralement les codes du film de gangsters dont il est lui-même l’un des principaux fondateurs.
Avec ce nouveau monument de cinéma (trois heures qui passent à toute vitesse), en fidèle cinéphile passionné, Scorsese régale le spectateur de nombreuses références cinéphiliques et divers clins d’œil aux films du genre, à commencer par ses propres films. Comme le dernier volet d’une trilogie consacrée à l’évolution des gangsters et des truands à travers l’histoire des États-Unis, Le Loup de Wall Street vient répondre, par son sujet et sa forme (majestueux travellings, maîtrise de la voix off omniprésente, flashbacks, arrêts sur image,…), aux deux chefs-d’œuvre du Maître que sont Les Affranchis (1990) et Casino (1996). En effet, toutes les figures et les codes du genre sont présents. A l’instar de ces deux très grands films, on constate également que dans ce dernier, les codes scénaristiques empruntent la même « mécanique grammaticale »: la présentation du héros, son arrivée dans un milieu « sauvage » aux codes « discutables », son apprentissage, son envol, ses belles années, et enfin, sa chute. Véritable portrait d’antihéros Scorsésien dans toute sa grandeur et sa décadence. Adepte du « Rise and Fall », Scorsese nous prépare à être les témoins d’une déchéance. « Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu être un courtier en bourse », cette déclaration de Belfort au début du film fait écho à celle que prononçait Henry Hill (interprété par Ray Liotta) au début des Affranchis : « Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu être un gangster ». Le constat amer que fait le personnage de Nicky Santoro (interprété par Joe Pesci) à la fin de Casino lorsqu’il déclare que les gangsters américains ne trouveront jamais plus une manne aussi pleine que celle du Las Vegas des 70’s, aujourd’hui transformé en parc d’attraction pour touristes et retraités fortunés, est dépassé. Il se trompait et ce film nous le prouve. Quelle tristesse de constater qu’à notre époque, la société et les truands qui la composent sont bien pires encore que leurs prédécesseurs par leur ignorance, leur monstruosité et leur absence totale de scrupules. C’est cet amer constat du chaos qui règne dans notre société pervertie par l’ultra libéralisme que fait Scorsese avec Le Loup de Wall Street. Les temps changent et les gangsters avec. Ils changent de milieu. Ils s’adaptent.
Démons intérieurs, paradis artificiels, perte de la réalité, des repères et du sens commun : Satire terrassante du culte de l’apparence et du matérialisme dans notre société contemporaine, le film contient les obsessions et les thématiques chères à son auteur. C’est avec toute la virtuosité qu’on lui connaît que Scorsese expose et développe avec précision sa critique acerbe de ce système voué à l’explosion. En montrant crûment les plus bas instincts de ces personnages devenus des opportunistes dénués de tout sens moral, le cinéaste dénonce les effets pervers de ce système sur la société et les individus.
Dans Le Loup de Wall Street, l’argent est partout. Les dollars tapissent littéralement le film et viennent tristement et pauvrement justifier les excès en tous genres, dans tous les vices (Drogues, sexe, alcool,…) et à outrance, des personnages déshumanisés et perdus dans cet enfer. Déconnectés de la réalité du monde, les personnages n’ont plus de dignité ni de limite dans la déchéance. A l’image de la société qui évolue vers le bas (autant dire qu’elle « dévolue »), ici, les gangsters ont perdu de leur classe, de leur superbe. Ils n’ont plus de principes, plus de codes. Ils s’approchent de l’état sauvage, de l’animal. Voir cette incroyable scène en haut d’un restaurant panoramique surplombant la jungle qu’est devenue New York où Mark Hanna (Matthew McConaughey une fois encore incroyable dans ce personnage qui représente une sorte de mantra de la cupidité) entonne une sorte d’incantation guerrière primitive afin d’expliquer sa philosophie du « métier », afin d’initier Jordan Belfort à ce monde sauvage et cruel où seuls la mégalomanie, l’égocentrisme et la jouissance prévalent. Le côté dérisoire et pathétique de cette scène montre magistralement cette régression, cette dégénérescence de l’individu et donc de la société. C’est bien à une description de l’enfer sur terre à laquelle nous convie ici le cinéaste.
Avec Le Loup de Wall Street, Scorsese offre aux spectateurs diverses pistes de lectures. Avec leurs comportements, tous les personnages sont ici les témoins de la perte des valeurs morales, sociales, éthiques, spirituelles et humaines que l’on peut tous observer aujourd’hui et qui dépassent allègrement le cadre du milieu de la finance. Quand l’argent facile devient roi, il pourrit tous les milieux. En effets les comportements et attitudes de ces attardés pervers et vils résonnent également avec le monde politique; le monde des grandes entreprises avec ses délocalisations, ses parachutes dorés et ses salaires honteux; le monde artistique avec ses incultes et incompétents surmédiatisés; le monde sportif avec ses analphabètes prétentieux et fier de l’être; le monde de l' »éducation » avec ses « boites » de commerces et autre « force de vente » qui forment cette caste en formatant les esprits et en faisant croire aux personnes les plus fragiles psychologiquement et les plus facilement façonnables, qu’elles deviennent des postes, des fonctions, des professions plutôt que des Êtres, des individus, des personnes douées d’intellect et de réflexion personnelle. De jeunes esprits pas encore formés, influençables, incapables de penser par eux-mêmes et de faire la part des choses. Autant d’individus qui ne vivent pas et qui ne s’en rendent même pas compte. Autant de personnes qui conjuguent leur quotidien et leur vie avec l’auxiliaire « avoir » plutôt qu’avec l’auxiliaire « être ». Le film dénonce la dictature et la fascination de l’agressivité commerciale de notre société qui dénature et formate les cerveaux des personnes dénuées de réflexion, de morale et de conscience.
En encourageant la création de monstres, ce système tue l’homme. Le loup du titre, le lion du logo de l’entreprise ou encore les comportements de charognard des protagonistes, évoquent plus une ménagerie de cirque qu’une société civilisée. C’est bel et bien au retour du règne animal dans toute sa cruauté et sa barbarie auquel on assiste. Pour preuves ces scènes obscènes de concours de lancé de nains organisé dans les bureaux; de tonte de secrétaire; ou encore d’Open Space, de yacht et d’avion transformés en lieux de débauche où se déroulent de véritables orgies… Paradoxalement, plus les individus sont déshumanisés, plus ils ont d’argent, plus ils se sentent supérieur aux autres et au-dessus des lois comme on peut le voir dans cette scène où Belfort sur son yacht jette du homard et des billets de banque à la figure des agents du FBI. Mais ce sentiment de supériorité et un tel mépris de l’autre, ne traduisent-ils pas en fait le signe même d’une infériorité manifeste et significative ? C’est par la démesure que l’on évalue la régression.
Conditionnée par la médiocrité omniprésente que tout impose aujourd’hui, la société est soumise à la dictature de la facilité par fainéantise intellectuelle. Nous sommes bien dans l’ère du culte du médiocre, de la futilité, du vide, du néant. Témoin d’une débauche de luxe, nous ne pouvons que constater cette pitoyable apologie du paraître et des signes extérieurs de richesse qui régit la vie et les comportements des personnages et qui traduit par la même toute la misère humaine de notre société actuelle. En accumulant les scènes de fêtes et d’orgies jusqu’à l’overdose, Scorsese filme comme personne cette recherche désespérée du plaisir à tout prix et cette frustration de ne jamais en avoir assez qui l’accompagne. Jamais rassasiés, les personnages en veulent toujours plus, mais leur bonheur factice et vide de sens révèle la quête éperdue et vaine d’un plaisir perpétuel. La tristesse du vice s’apparente à la tristesse du vide. Ceux qui règnent sont damnés.
Si le rythme effréné du film peut étonner par son contraste radical avec les précédents films du réalisateur qui faisaient plutôt référence au passé (Hugo Cabret (2011) et Shutter Island (2010)), on comprend très vite que la talentueuse mise en scène maîtrisée et réfléchie de Scorsese vient étayer son sujet avec maestria. Pour filmer cette meute, Scorsese lâche les chiens. Sous couvert d’une comédie hilarante et absurde, avec une liberté totale de ton et de forme, Scorsese ne réalise pas une farce mais une fresque dramatique épique sur l’obsession de la recherche vaine du plaisir permanent, qui décrypte et décrit tout aussi bien la mécanique de ces arnaques légales, les techniques de vente, de blanchiment et de dépense de cet argent qui corrompt et pourrit tout sur son passage, les hommes comme la société, que le quotidien de ces hommes au « travail » ou en « famille ». Il observe et décrit ces personnages évoluant dans cet univers pervers et perverti avec ses us et coutumes, sans jamais les défendre ou les apitoyer. C’est avec finesse et intelligence qu’il dresse un constat certes affligeant mais sans pour autant être puritain ou moralisateur. Chrétien devant l’éternel (pour rappel, Scorsese a effectué des études de théologie et se destinait à devenir prêtre) mais sans aucune mansuétude, Scorsese dénonce la médiocrité de cet univers et la vulgarité de ceux qui le peuplent avec le mépris qu’ils méritent. Le décryptage du vice que nous propose ici le cinéaste vient approfondir et élargir son travail colossal sur la violence qui reste, avec la religion, son obsession de toujours. Même si elle n’est pas directement « physique », la violence, l’ultra violence, morale et psychologique, est bien présente. La scène où Belfort repousse les limites de prise de drogue et de ses effets dévastateurs en allant jusqu’à la paralysie cérébrale provoquant comme une dislocation du corps rappelle Raoul Duke, le personnage qu’interprétait Johnny Depp dans Las Vegas Parano (1998) de Terry Gilliam, mais témoigne surtout du fait que la violence faite ici au corps est bien réelle et participe d’un processus d’autodestruction inéluctable. Le scénario et la mise en scène viennent traduire cet abîme dans lequel les personnages se perdent et sombrent en entraînant la société dans leur naufrage comme le suggère par métaphore cette scène de naufrage du yacht (clin d’œil à la scène de fin cathartique de Les Nerfs à vif (1992) de Scorsese) où le « héros » face à la mort ne pense qu’à se droguer plutôt qu’à sauver sa propre vie. Les êtres ne sont plus que des corps, des objets sans valeur et ce sont les addictions qui viennent combler le vide qui habite ces êtres perdus. La drogue a pris toute la place. Elle remplace tout. Plus rien d’autre n’existe. Ceux qui règnent ne connaîtront pas la rédemption.
La figure du gangster faisant office de figure christique dans l’œuvre du cinéaste rappelle qu’elle fait partie intégrante du mythe du rêve américain. C’est sa face noire, son inévitable face cachée. Elles sont indissociables chez Scorsese. Mais contrairement aux personnages de ses autres films, aucune rédemption n’est possible ici pour ces idiots dont les actes et pensées sont exclusivement définis .par leur avidité et leurs instincts primaires. Sans principe, sans morale, sans foi ni loi, à l’image du Scarface (1984) de Brian De Palma, ces « golden boys » des beaux quartiers sont en fait bien pire que les gangsters. Mais c’est à un autre film de Brian De Palma auquel Le Loup de Wall Street fait le plus penser : Le Bûcher des Vanités (1990) dans lequel, à la suite d’un banal fait divers, Sherman McCoy (Tom Hanks), élite de la haute finance new-yorkaise, devient la proie des politiciens, des médias et de la justice qui ont besoin de redorer leur blason… Dénués d’amour propre et leurs actes cautionnés par le système, ces hommes trompent impunément tout le monde, femme, famille, amis, clients, associés, à commencer par eux-mêmes. L’argent tue tout lien social. Même si les portables et autres outils informatiques ont remplacé les armes à feu, les méthodes mafieuses sont les mêmes et ses effets bien plus destructeurs. Ces « Affranchis » cambriole « Wall Street » comme un « Casino ». Le fait que ce système soit toujours en place actuellement et que ses acteurs continuent de sévir donne au film une dimension plus noire et pessimiste dans sa conclusion. Comme en témoigne la magistrale et glaçante conclusion de l’histoire, incapable de se remettre en question, de se corriger, ni même d’apprendre de ses échecs, la chute de Belfort est moins évidente socialement que humainement. Déjà que ni le talent, ni le succès ne se mesurent plus au mérite ni au travail effectué mais aux millions gagnés voir même volés, le constat triste et désespérant de ces échecs, de ces crises et autres scandales à répétition qui continuent de susciter l’admiration voir même des « vocations » et de faire « rêver » les esprits les moins évolués, effraye pour l’avenir. Le contre-champ final nous montrant ces esprits grégaires subjugués par la logorrhée verbale du gourou leur expliquant explicitement comment devenir une ordure est d’une noirceur absolue. Loin d’être radicale et définitive, la chute ici ne semble être que passagère. Comble de l’ironie, Jordan Belfort n’a effectué que vingt mois de prison pour ses méfaits, son livre retraçant son histoire est devenu un best-seller dont les droits d’adaptation se sont arrachés aux enchères et ce dernier touche aujourd’hui des royalties sur les entrées du film. Paradoxalement, on peut dire que la « success-story » de Belfort symbolise la faillite et l’échec d’un système pourri et devenu incontrôlable. Prisonnier d’un cercle vicieux, au sens propre comme au sens figuré, ce personnage monstrueux semble s’autoalimenter de ses défauts pour se régénérer et repartir de plus belle. L’impunité de toute cette immoralité et cette « impression » d’encouragement du système et de la société provoquent l’écœurement et le dégoût pour la majorité la plus sensée des individus. Alors comment expliquer que de tels ratés puissent, avec l’assentiment de la société, susciter l’admiration et l’envie chez certains ? Car ce sont bel et bien ces minables qui vendent du rêve aux jeunes idiots d’aujourd’hui. Mais quel rêve ?
Dans sa mise en scène, jamais le réalisateur ne montre le contrepoint de ses protagonistes. Mis à part l’effrayant contre-champ final et l’unique plan évocateur d’un monde réel avec l’agent du FBI dans le métro à la fin du film, jamais on ne voit le peuple, les proies ou les victimes de ces criminels. Le choix de cette forme radicale de la part de Scorsese vient appuyer l’importance qu’il donne à ses personnages.
Fidèle à sa manière d’aborder ses films et ses sujets, Scorsese fait la part belle à ses personnages et donc à ses comédiens qui, on le ressent bien à l’écran, se sont tous ici sérieusement et humainement investis afin d’être le plus crédible possible dans ces rôles difficiles à incarner. Le plaisir que chacun d’entre eux a pris à se laisser aller à ses plus bas instincts est également bien visible sur la toile.
En incarnant avec grandiloquence et cynisme le personnage de Jordan Belfort, ce courtier en bourse new-yorkais dont la mégalomanie n’a d’égal que le pathétisme de sa vie vide de sens et dépourvue d’humanité, Leonardo DiCaprio effectue une composition magistrale et ajoute un portrait de maître à la galerie personnelle et originale de Christ du réalisateur. Tantôt charmeur, tantôt effrayant, il est tout simplement parfait dans ce personnage de gourou machiavélique, cet ogre insatiable qui parcours la vie comme une « fête » gigantesque et perpétuelle au mépris de ceux qui l’entourent. Sa stupéfiante interprétation nous offre de véritables scènes d’anthologie. Habité par son personnage hors-norme, hâbleur et séducteur, il galvanise tout autant le spectateur que ses troupes de suiveurs sans cerveau avec ses speechs grotesques et outranciers. Son personnage déjanté et l’intensité du jeu de l’acteur font penser aux meilleures compositions de Jack Nicholson auquel DiCaprio parvient même, avec son regard de fou et son sourire carnassier, à ressembler physiquement dans certaines scènes. La performance physique qu’il livre ici repousse une fois de plus les limites de son charisme. Époustouflant. Dans le sillage de DiCaprio, les seconds rôles étant de premier ordre, les autres comédiens ne sont pas en reste. De Matthew McConaughey à Rob Reiner en passant par Margot Robbie ou encore Jon Favreau, tous sont justes et apportent une dimension à la fois crédible et pathétique à leurs personnages. Avec une mention particulière pour l’incroyable prestation que compose Jonah Hill pour ce rôle d’acolyte incontrôlable rappelant Joe Pesci. Il est indiscutablement LA révélation du film. Ambigus et fouillés, les personnages secondaires ne sont en rien caricaturaux. Au diapason de ces personnages hallucinants de médiocrité manifeste, les comédiens sont tous démentiels.
L’efficacité et la réussite du film doit également beaucoup à la fidélité du réalisateur envers ses collaborateurs techniques. Avec ce film, il signe rien de moins que sa vingt-deuxième collaboration avec sa talentueuse chef monteuse Thelma Schoonmaker, et la sixième avec Rob Legato, le superviseur des effets visuels, ou encore Sandy Powell, la chef costumière. Pour l’adaptation du roman de Belfort à l’écran, Scorsese a confié l’écriture du scénario à Terence Winter, talentueux scénariste des Soprano ou encore de Boardwalk Empire.
Avec ce véritable film à charge, Scorsese livre un film somme qui dynamite l’image trop lisse et formatée que nous donnent les films et séries sur le sujet depuis des années, et rappelle au passage, qu’à plus de 70 ans, il est toujours le taulier ! Pied au plancher, il continue son travail d’expérimentation sur le cinéma avec plus de fougue, d’inventivité et de talent que la jeune génération. Sa brillante et originale mise en scène tutoie tout autant son sujet que son scénario ou ses personnages. Tout aussi hallucinée que délurée, elle est à l’image de ce qu’elle dénonce avec rage.
Fresque bouillonnante et euphorique, farce insolente, conte moral, ou encore portrait satirique implacable d’un raté, miroir de l’Amérique et du système économique occidental décadent voué à l’échec, Le Loup de Wall Street conclut avec maestria une fascinante trilogie qui marque à jamais toute l’histoire du cinéma. Au sommet de son Art, avec une liberté totale de ton et de création, Martin Scorsese dénonce et condamne avec violence et virtuosité, l’hubris pathétique de toute une génération en perdition qui entraîne inexorablement le monde dans sa chute sans le moindre état d’âme.
Un grand film de notre époque qui restera comme beaucoup d’autres chefs-d’œuvre de son auteur, un classique du cinéma. Un monument !
Steve Le Nedelec
Le Loup de Wall Sreet (The Wolf of Wall Street) un film de Martin Scorsese, avec Leonardo DiCaprio, Jonah Hill, Margot Robbie, Matthew McConaughey, Kyle Chandler, Rob Reiner, Jon Favreau, Jon Bernthal, Jean Dujardin, Joanna Lumley, Cristin Milioti, Katarina Cas, Christine Ebersole, Spike Jonze. Scénario : Terence Winter d’après le roman de Jordan Belfort. Photo : Rodrigo Prieto. Directeur Artistique : Chris Shiver. Montage : Thelma Schoonmaker. Musique : Howard Shore. Producteurs éxecutifs : Irwin Winkler, Alexandra Milchan, Danny Dimbort, Rick Yorn, Joel Gotler. Producteurs : Martin Scorsese, Leonardo DiCaprio, Emma Tillinger Koskoff, Riza Aziz, Joey McFarland. Production : Red Granite Pictures – Appian Way – Sikelia Productions – EMJAG Productions. Distribution (France) : Metropolitain FilmExport (25/12/13) USA. 2013. Couleur. Format : 2,35:1 Durée : 180 mn. Interdit aux moins de 12 ans.