C’est le grand jour pour Big T. (Tray Loren): il épouse la belle Angélique (Jan Mackenzie). Le cauchemar de l’agression qu’il a subie avec sa famille est maintenant loin derrière et un avenir radieux s’ouvre à lui. Mais, lors de la cérémonie, Big T. a une altercation avec Leroy son grand ennemi… Les ténèbres vont s’abattre sur le jeune couple pulvérisant le fin linceul du bonheur….
Les marais de la haine avait attiré l’attention des aficionados sur le couple Ferd et Beverly Sebastian, sa suite La Vengeance de la femme au serpent va les faire entrer dans la légende du cinéma Rednecks. Le film va susciter toute sorte de fantasme autour de la famille Sebastian assimilant le contenu des deux films à leur supposer dégénérescence. Il faut dire qu’avec La Vengeance… le couple va frapper fort. Mais remontons dans le temps.
Le marais de la haine est en 1974 un carton dans les salles dans le Sud des Etats-Unis. Une décennie plus tard, aux premiers temps de la vidéocassette, le film distribué par la Paramount rapporte une fortune. Il faut dire qu’au début de la vidéo domestique les Studios gardaient jalousement leur film et se méfiant comme de la peste d’un support qui faisait du consommateur le détenteur d’une copie, limitant ainsi à leurs yeux les recettes d’un film. Mais il fallait être présent sur un marché aussi juteux. Ils n’hésitent donc pas à plonger dans le cinéma indépendant et de préférence dans les marges, c’est l’explosion du cinéma de genre. Epoque bénie des vidéoclubs où le cinéphile déviant découvre toutes sortes de films où la violence et le sexe se taillent la part du lion. Le marais de la haine rapporte tellement de beaux billets verts que la Paramount commande, quinze ans après le premier opus, aux Sebastian une suite destinée au marché de la vidéo. Le couple se met aussitôt au travail.
L’histoire de La Vengeance de la femme au serpent suit à peu près la même ligne narrative que Les marais de la haine. Contrairement à ce qui se passe souvent avec les suites, celle-ci n’est pas «adoucie», on retrouve dans La vengeance de la femme au serpent la sauvagerie déjà à l’œuvre dans Les marais de la haine… Le film est une suite directe quinze ans après les faits. On retrouve les survivants du carnage de 1974. Le plus gros problème auquel les Sebastien sont confronté est l’absence de leur héroïne, l’actrice Claudia Jennings décédée entretemps dans un accident de la route. Qu’à cela ne tienne, les Sebastian décident de faire la jonction entre les deux films par le biais de personnages secondaires. Ainsi, Big T. le jeune adolescent muet du premier film devient un jeune homme en âge de se marier. Le temps ayant passé, Big T. a retrouvé la parole et les traumatismes s’en sont allés. Le film débute par son mariage avec Angélique (Jan Mackenzie), l’archétype de la bombe redneck, la rousse à gros seins et à la peau très blanche.
Pour ce nouvel opus, les Sebastian enrichissent leur propos d’une approche plus sociologique sur les habitants du coin. Le mariage est conforme à la réalité et l’aventure a lieu dans les profondeurs du bayou au milieu de maisons sur pilotis pour les endroits les plus peuplés. Ils reprennent des éléments du premier film et les figures de style liés au genre; enfin, ils s’inspirent d’un Rape and Revenge ultime I Spit on your Grave / Day of the Woman (1978) pour quelques scènes bien violentes. Ils font donc subir à Angélique un véritable chemin de croix avant que celle-ci ne se transforme en ange exterminateur. Rôle pas si évident auquel Jan Mackenzie donne vie avec une grande conviction – elle exécute elle-même les cascades – et, même si elle n’a pas la finesse de Claudia Jennings, la bougresse à des arguments de poids, de quoi rendre raide dingue un redneck. Et c’est bien là le principal.
Laissée seule dans une cabane au fond de bois par son mari, Angélique n’a pas de meilleure idée que de prendre un bain en extérieur. Evidemment, elle se retrouve sous le regard des péquenauds si excités que le peu de neurones qui leur restent explosent dans la caboche. C’est l’heure pour Leroy de régler un vieux contentieux avec Big T. Angélique va en faire les frais. Séquestrée, la pauvre doit se plier aux fantasmes ras de la braguette de Leroy. Après moult humiliations et avoir été violée, Angélique réussit à s’échapper. Elle se lance dans une folle croisade à travers le bayou. Chasse à l’homme libératrice qui mettra définitivement fin à la lignée des Leroy.
Autant de péripéties trashs et violentes auraient dû assurer à elles seules la renommée du film. Ce qui va surtout marquer les esprits, ce sont les ébats très hot de Big T. et Angélique, joués respectivement par le fils et la belle fille (Jan Mackenzie) de Ferd et Beverly Sebastian. Le voyeurisme du film accentué par de réels liens familiaux a de quoi exciter l’imagination perverse des cinéphiles déviants. Qui, à part de gros pervers, pourrait filmer des scènes si intimes ? Il est vrai qu’ils poussent le bouchon jusqu’à filmer Jan Mackenzie sous toutes les coutures avant de la faire sauvagement violée. Les rednecks sont fous issus de mariage consanguin sauf que les Sebastian et famille ne sont en rien des culs-terreux mais de bons Californiens !
La Vengeance de la femme au serpent est encore un exemple du cinéma des années 80 où le formatage et le politiquement correct n’avait pas encore anéanti toute création aussi trash et déviante soit-elle.
Fernand Garcia
La Vengeance de la Femme au serpent est édité par Artus Films dans la collection Rednecks avec en suppléments : Rednecks et Rape and Revenge, par Maxime Lachaud, auteur du livre Redneck Movies, retour sur les origines du genre, les figures imposées, le viol « généralement d’une femme à la peau très blanche » et la vengeance de la victime. Plusieurs pistes pour mieux comprendre ce cinéma, instructif (26 minutes).
Le Making of original : Gator Bait II – Pris dans le marais, Ferd et Beverly Sebastian répondent avec humour à des questions sur le tournage, pour le moins épique de La Vengeance de la femme au serpent (13 minutes).
Une visite chez Ferd et Beverly Sebastian, que sont-ils devenus, le moins que l’on puisse dire c’est que c’est étonnant, ce témoignage est aussi en complément du Marais de la haine (11 minutes). Et enfin, le Film-annonce original et les spots TV pour la promotion de La Vengeance de la femme au serpent.
La Vengeance de la Femme au serpent (Gator Bait II : Cajun Justice), un film de Ferd et Beverly Sebastian avec Jan Mackenzie (Jan Sebastian), Paul Muzzcat, Brad Kepnick, Jerry Armstrong, Ben Sebastian, Reyn Hubbard, Tray Loren, Levita Gros… Scénario : Beverly Sebastian. Directeur de la photographie : Ferd Sebastian. Décors : Beverly Sebastian. Effets spéciaux : Ben Sebastian. Musique : George H. Hamilton. Producteurs : Ferd et Beverly Sebastian. Production : Sebastian International Pictures – Paramount Pictures. Etats-Unis. 1988. 97 minutes. Couleur. Format image : 1.37 :1. 4/3. VOSTF et VF. Interdit aux moins de 16 ans.