Hello ami(e)s lecteurs, voici une petite critique à lire dans le silence. L’histoire qui nous importe aujourd’hui se déroule à Hollywood, la capitale du cinéma du grand Los Angeles. Ce matin-là, sous un ciel d’un bleu immaculé, trois lascars arrivent en ville. Mel Funn (Mel Brooks) réalisateur populaire que l’addiction à l’alcool a éloigné des studios, accompagnés de ses fidèles amis Dom Bell (Dom DeLuise) et Marty Eggs (Marty Feldman). C’est un grand jour pour Mel Funn. Il a entre ses mains le projet du siècle, le prochain triomphe d’Hollywood ! Il a rendez-vous avec le boss (Sid Caesar) de Big Pictures Studios. Ce qu’il ignore, est que le studio est au bord de la faillite, les bénéfices sont en chute libre. Le boss tombe des nues quand Mel Funn lui annonce que son film sera muet ! Mais bon, Funn totalement investi dans son projet, lui promet des stars en tête d’affiche. Tandis que le trio traverse la ville à la recherche des fameuses stars, les rapaces de la multinationale Engulf (Engloutit) and Devour (Dévore) s’organisent en coulisses pour absorber Big Pictures Studios.
La dernière folie est donc un film muet, ce qui n’empêche en rien les effets sonore et la musique, bien au contraire. Le film de Mel Brooks est une enfilade de gags, il joue à fond la carte du burlesque. Mel Funn et ses acolytes se retrouvent dans des situations les plus improbables à la recherche des stars qui illumineront leur film. Chaque séquence met donc en scène une star, et pas des moindre, Burt Reynolds, James Caan, Liza Minnelli, Anne Brancroft (Madame Mel Brooks à la ville), Paul Newman dans une série de situations franchement drôles. Chaque star joue le jeu et se parodie gentiment. Paul Newman se prête à une séquence de course automobile, un des passions de l’acteur, en chaise roulante ! Superbe gag, le mine Marceau, refuse catégoriquement d’être dans un film muet et prononce le seul mot du film, « Non ! » Mel Brooks réussit une gageure, son Silent Movie est le film que tente de monter son double Mel Funn.
La dernière folie est un formidable hommage au cinéma des temps héroïques et de ses artistes : Keaton, Chaplin, Sennett, et les autres. On retrouve sous la houlette de Mel Brooks les personnages et les ingrédients des petites bandes burlesques de l’époque : les riches, les clodos, l’ivresse, les amours contrarié, les rues malfamés, l’hôtel sordide, la voiture décapotable, le cabaret, les girls, le flic en moto, les grandes salles de cinéma, etc. Mel Brooks revisite avec gourmandise cette merveilleuse période et sous l’humour et la poésie ponte une critique acerbe d’un système commercial qui étouffe toute création. Une industrie du spectacle désormais soumise aux diktats de des multinationales. Engulf & Devoir (Engloutit & Dévore) dont le slogan Our Fingers are in Everything (Nos doigts sont partout) est une parodie à peine voilée de la Gulf and Western Industrie, un conglomérat d’entreprise, à l’époque propriétaire de la Paramount. Mel Brooks s’en donne à cœur joie : chaque réunion du Conseil d’administration s’ouvre sur une prière au Dieu-Dollar :
Ô Dollar Tout-puissant,
Nous prions pour Toi,
Car sans Toi,
Nous sommes de La Merde.
Le but d’Engulf et Devour est de faire du profit, rien que du profit et de mettre la concurrence à genoux. Une véritable meute assoiffée de sang et de dollar. Dans les toilettes, les tags des actionnaires témoignent de leur hargne : Vivent les riches ! La pauvrette c’est nul ! Des prédateurs sans foi ni loi qui mettent la main sur la création. Cette critique est plus que jamais d’actualité. Mel Brooks ne pouvait imaginer un pire cauchemar que la Le but d’Engulf et Devour est de faire du profit, rien que du profit et de mettre la concurrence à genoux. Une véritable meute assoiffée de sang et de dollar. Dans les toilettes, les tags des actionnaires témoignent de leur hargne : Vivent les riches ! La pauvreté, c’est nul ! Des prédateurs sans foi ni loi qui mettent la main sur la création. Critique est plus que jamais d’actualité. Mel Brooks ne pouvait imaginer un pire cauchemar que la réalité d’aujourd’hui. Que la 20th Century Fox, productrice du film, deviendrait la propriété de la Walt Disney Company. Que les centaines de chefs-d’œuvre de la société de Zanuck iraient enrichir le catalogue de films quasi irregardable de la souris aux grandes oreilles. Le soft power est devenu un enjeu capital pour les grands groupes qui ont investi des milliards de dollars dans l’Entertainment. Tout cela n’a plus rien à voir avec les studios dirigés par les frères Warner, Zanuck, Mayer et consœur. Il suffit de pousse la porte d’un multiplexe pour se rendre compte de l’étendue des dégâts. Toute originalité et ambition artistique en est bannies, la création réduite à peau de chagrin sous le poids des études et analyses marketing. Le spectateur a aussi sa part de responsabilité, abdiquant tout esprit critique devant n’importe quelle grosse production aseptisée, bruyante et vide, destinés aux moins de 12 ans. Il faut dire que la critique n’est pas en reste y consacrant article sur article. Aucune raison donc que la tendance ne s’inverse. En 1976, il y avait encore des espaces de liberté, une volonté de laisser des films dans l’histoire du cinéma, et un public varié, pas encore totalement infantilisé par le rouleau compresseur Disneyen.
La dernière folie de Mel Brooks est, selon les critères de la morale et de bien-pensante des temps présents, totalement incorrect. Le plus amusant est que de simple blagues, anodines au siècle dernier, soient aujourd’hui estampillés subversives. Raison de plus pour les grands et les petits se précipiter sur La dernière folie. Bon film et Good-bye.
Fernand Garcia
La dernière folie de Mel Brooks est disponible aux éditions BQHL pour la première fois en Blu-ray (Master HD superbe).
La dernière folie de Mel Brooks (Silent Movie) un film de et avec Mel Brooks et Marty Feldman, Dom DeLuise, Sid Caesar, Paul Newman, Liza Minnelli, Burt Reynolds, James Caan, Anne Bancroft, Marcel Marceau, Harold Gould, Ron Carey, Bernadette Peters, Carol Arthur, Liam Dunn… Scénario : Mel Brooks, Ron Clark, Rudy DeLuca, Barry Levinson d’après une histoire de Ron Clark. Directeur de la photographie : Paul Lohmann. Décors : Al Brenner. Costume : Patricia Norris. Montage : John C. Howard et Stanford C. Allen. Musique : John Morris. Producteur : Michael Hertzberg. Production : Crossbow Productions, Inc. – 20th Century Fox. Etats-Unis. 1976. 87 minutes. Couleur DeLuxe. Panavision sphérique. Format image : 1,85 :1. Son Version originale intertitres sous-titrés en français. Tous Publics.