Un jeune chat noir, seul, se promène dans une forêt. Soudain, un lapin passe devant lui à toute allure, poursuivi par une meute de chiens. Le chaton continue son exploration et découvre une maison entourée de statues en bois représentant des chats. À l’étage, il aperçoit, à travers une vitre brisée, un lit où, épuisé, il s’endort profondément. Tout semble paisible dans la forêt. Plus tard, au bord d’un ruisseau, le chat boit un peu d’eau, lorsqu’il entend des aboiements menaçants se rapprocher. La meute de chiens arrive alors au point d’eau…
Dans cette forêt luxuriante à l’aspect idyllique, de nombreux drames se jouent en silence. Chaque être doit constamment rester sur ses gardes. Quant au petit chat, nous ne saurons rien de son passé. A-t-il été abandonné ? A-t-il grandi ici ? Est-il lié à la maison ? L’homme a disparu, et dans Flow, il ne reste que des traces de son passage : des constructions, des bateaux, des sculptures. Le naturalisme du film de Gints Zilbalodis se situe à la frontière entre science-fiction et fantastique. L’immense vague qui submerge la forêt (le monde) emporte le chat dans une longue aventure initiatique.
Le chat trouve refuge sur un petit bateau à voile à la dérive, où il finit par cohabiter avec un capybara, un lémurien, un grand oiseau blessé, puis un chien. Peu à peu, chacun apporte ses connaissances au service de la petite communauté. « Au début, le chat est indépendant et n’a aucune envie de côtoyer les autres animaux. Mais je ne voulais pas baser le film sur une idée aussi didactique. J’ai donc créé un nouvel équilibre en ajoutant des personnages comme le chien dont le cheminement est à l’opposé de celui du chat : au début de l’histoire, il suit toujours quelqu’un. Mais il évolue, et à la fin il est plus indépendant et prend ses propres décisions. Chacune des personnalités de ces bêtes reflète un aspect de l’individu confronté à la vie en société. » Gints Zilbalodis. L’oiseau et le chat apprennent à manœuvrer la barre, ce qui leur permet d’éviter certains dangers. Cet instinct de survie fait naître une solidarité qui dépasse la peur de l’autre. La destruction de la civilisation ne marque pas la fin de l’humanité : chaque être porte en lui la force de la vie. La mer, bien qu’elle soit dangereuse, représente aussi une régénération du monde. L’absence de dialogue — les animaux communiquent avec leurs propres langages, ce qui est l’une des grandes qualités du film — met en valeur un univers sonore d’une grande richesse et concentre notre attention sur les paysages.
Le périple du chat, d’abord solitaire puis collectif, illustre que face à l’adversité, rien n’est plus puissant que l’union et la solidarité. Flow, au-delà de sa beauté esthétique, se révèle être l’un des plus magnifiques films d’animation de ces dernières années.
Fernand Garcia
Flow, le chat qui n’avait pas peur de l’eau (Straume) un film de Gints Zilbalodis. Scénario : Gints Zilbalodis et Matiss Kaza. Script : Ron Dyens. Sound Design : Gurwal Coïc-Gallas. Directeur d’Animation : Léo Silly-Pélissier. Musique : Gints Zilbalodis et Rihards Zaļupe. Producteurs : Matīss Kaža, Gints Zilbalodis, Ron Dyens, Gregory Zalcman. Production : Dream Well (Lettonie) – Sacrebleu Productions (France) – Take Five (Belgique) avec la participation de Arte – RTBF – Canal + – Eurimages – Ciné + OCS Région Sud. Distribution (France) : UFO Distribution (Sortie le 30 octobre 2024). Lettonie – France – Belgique. 2024. 1h25. Couleur. Format image : 2.00:1. Dolby Digital. Un Certain Regard, Festival de Cannes, 2024 – Prix du Jury, Prix du Public et de Prix Fondation Gan à la diffusion, Annecy, 2024 – TIFF 2024 – Meilleur film d’animation, European Film Award, 2024. Tous Publics.