Clint Cooper est de retour à Shelby, sa ville dans le Montana. Il avait dû la quitter deux ans auparavant après avoir tué deux frères en légitime défense. En chemin, il croise Spangler et sa bande. Le bandit lui propose de dévaliser avec lui la banque de la ville. Clint refuse, il a d’autres projets…
Feu sans sommation est un western au scénario limpide et à la structure dramatique simple et efficace. Le film est mené tambour battant, son action se déroule sur à peine vingt-quatre heures. Dès la première bobine les enjeux sont clairement mis en place. Clint (Audie Murphy) arrive en ville, il sait que Spangler (Ted de Corsia) va prendre d’assaut cette ville pour la piller. Spangler profite de l’absence des éleveurs pour commettre son forfait. Clint sait que le sinistre projet aura lieu dans la nuit. Clint doit faire face à l’hostilité de la population et surtout à la haine du père des deux frères qu’il a abattus. Pourtant pour lui l’enjeu principal est de regagner la confiance et l’amour de son ex petite amie, Helen Reed (Merry Anders). Cette reconquête est aussi celle qui lui permettra de reprendre sa place dans la petite communauté. Hélas, Helen doit épouser le meilleur ami de Clint, Scotty (James Best), devenu entretemps shérif. Avec un tel scénario, confrontant son héros à tous, une série de problèmes et d’embûches, l’attention du spectateur ne se relâche à aucun instant.
Le scénario est une exaltation traditionnelle des valeurs américaines : le travail, l’individualisme, la religion et recours à la force et aux armes. Il faut défendre ses valeurs par tous les moyens. La violence est sans cesse justifiée, elle est même inéluctable. Le révérend, qui prône la discussion avec le hors-la-loi, est dans l’erreur. Ainsi le Shérif, qui suit ses recommandations de non-violence, va connaître une fin tragique. Les armes doivent parler et les « bons » gagneront. Le film est tout entier du côté de cette communauté conservatrice. Et aussi étonnant que cela puisse paraître, c’est le méchant Spangler, qui aura un effet révélateur sur au moins un personnage, Helen.
Spangler, est un vrai barbare, le scénario n’y va pas par quatre chemins – non seulement il vient pour l’argent, mais aussi pour satisfaire ses instincts les plus bas. Et c’est par pur plaisir qu’il tue, viole et saccage les villes. Cette notion de plaisir est totalement inconnue des habitants de la petite ville. Sa rencontre avec Helen va permettre à cette institutrice d’entrevoir une sortie du cadre étroit de sa vie formatée. Son avenir, que ce soit avec Clint ou Scotty, se limite au mariage et avoir des enfants. Qu’elle soit avec l’un ou l’autre cela ne change rien à sa vie. Une vie monotone à l’image des autres femmes de la ville, des bigotes au chemisier boutonné jusqu’au cou. Spangler ne s’embarrasse pas de romance, pour lui, Helen est avant tout une femme, un corps avec ses désirs, fait pour l’amour. On pourrait même dire que c’est cet être abject et libidineux, qui va faire prendre conscience à Helen, qu’elle est une femme à part entière. Cette perspective l’épouvante, elle n’est pas encore prête à être libre. En ce sens, le final, que je ne dévoilerai pas, est assez explicite. Face à l’inconnu, Helen choisit la norme et le conformisme.
La mise en scène de Sidney Salkow est carrée sans fioritures. Son utilisation du scope est excellente, il suffit pour s’en rendre compte de faire attention à la position des personnages dans le cadre. La photographie de dernière partie, entièrement de nuit, est très réussie.
Feu sans sommation prend place à la fin d’un genre. Il date de 1964, le monde est en pleine mutation. Le western des origines, de la nouvelle frontière, des pionniers est moribond. Une révolution va naître en Italie sous l’impulsion de Sergio Leone et de son Pour une poignée de dollars, relecture de Yojimbo d’Akira Kurosawa.
Feu sans sommation fait partie de ces petits westerns de série B qui faisaient le bonheur des cinémas de quartier et qui procure un vrai plaisir de spectateur.
Fernand Garcia
Feu sans sommation est édité pour la première fois en DVD par Sidonis/Calysta dans une superbe copie, image et son restaurés, avec en complément de programme une présentation par Patrick Brion, qui resitue le film dans son époque et dans l’histoire du western.
Feu sans sommation (The Quick Gun) un film de Sidney Salkow avec Audie Murphy, Merry Anders, Ted de Corsia, James Best, Walter Sande, Raymond Hatton, Frank Ferguson. Scénario : Robert E. Kent d’après une histoire de Steve Fisher. Directeur de la photographie : Lester Shorr. Décors : Robert Purcell. Montage : Grant Whytock. Musique : Richard LaSalle. Producteur : Grant Whytock. Production : Admiral Pictures – Columbia Pictures Corporation. Etats-Unis. 1964. 85 mn. Couleurs. Technicolor. Techniscope. Format image : 2,35 :1. Version : VOST et VF. Tous publics.