Dès le premier plan, deux vieux chercheurs d’or de nuit sous une pluie battante pénètrent dans un saloon, nous devinons que nous avons affaire à un film à la réalisation enlevée. Le cadre est remarquable, la scène suffisamment intrigante pour happer immédiatement notre attention. Après des années d’un rude labeur, nos deux lascars ont enfin décroché le gros lot… des pépites grosses comme le poing dans une mine d’or dont eux seuls connaissent l’emplacement ! Fiers et heureux de leur découverte, ils offrent du champagne, c’est dire l’importance de l’événement, à tous les cow-boys, chercheurs d’or et va-nu-pieds du saloon. Par cette nuit de déluge, arrive un voyageur, un étranger, Nick Buckley (Robert Young), à la recherche d’un abri pour son cheval. Tapi dans l’ombre, Jim Rupple (Frank Fenton) voit dans les deux chercheurs le moyen de faire rapidement fortune…
En quelques minutes, George Sherman met en place le drame qui va faire basculer la vie de Nick Buckley, notre héros. Sa mise en scène est particulièrement efficace. Ainsi, si l’un des méchants est immédiatement identifié par l’autre, Tex Brandow (Barton MacLane), reste une ombre portée sur le mur du saloon. Il enchaîne avec l’introduction de l’unique personnage féminin du film, Luella (Marguerite Chapman). Rapidement, les différents protagonistes de l’histoire sont mis en place. Accusé injustement de plusieurs meurtres, Bukley doit fuir, le shérif (Willard Parker) à ses trousses, pour retrouver le véritable coupable.
Sur un scénario plus que traditionnel, George Sherman, réussit une brillante mise en scène. Curieusement ses personnages principaux sont assez ternes : Robert Young, Marguerite Chapman et Willard Parker ne sont pas particulièrement charismatiques, ni sexy. Ce qui est dommage. Par contre, le choix des seconds rôles s’avère bien meilleur. Barton MacLane donne une véritable épaisseur à son méchant, Akim Tamiroff est un concentré de filouterie poisseuse qui dynamise la deuxième partie. C’est aussi des tronches comme celles des mineurs ou de ce vieil homme dans la ville fantôme.
Du Sang dans la sierra est un western particulièrement soigné. Une grande diversité de décors, la ville, la montagne sous la neige, la ville fantôme, le désert sous un soleil de plomb… des espaces particulièrement bien mis en valeur par George Sherman. Il faut reconnaître que le découpage de Sherman est impeccable. La grande variété des plans : ensemble, moyen, américain, gros plans de Sherman s’enchaînent harmonieusement avec élégance. Une mention aussi pour l’excellente photographie en couleurs (Technicolor) d’Edward Cronjager.
Du Sang dans la sierra est un western plaisant à voir avec ses enfants.
Fernand Garcia
Du Sang dans la Sierra est édité pour la première fois en DVD par Sidonis/Calysta dans une belle copie (image et son restaurés). En complément de programme deux présentations : l’une par Bertrand Tavernier qui analyse le film (16 mn), l’autre par Patrick Brion qui replace Du Sang dans la Sierra dans l’histoire du western (6 mn). Les deux interventions se complètent parfaitement (Réalisation Eric Paccoud).
Du Sang dans la Sierra (Relentless) un film de George Sherman avec Robert Young, Marguerite Chapman, Willard Parker, Akim Tamiroff, Barton MacLane, Mike Mazurki, Robert Barrat, Clem Bevans, Frank Fenton. Scénario : Winston Miller d’après le roman de Kenneth Perkins. Directeur de la photographie : Edward Cronjaeger. Consultant Technicolor : Nathalie Kalmus. Décors : Stephen Goosson & Walter Holscher. Montage : Gene Havlick. Musique : Marlin Skiles. Producteur : Eugene B. Rodney. Production : 7 Cavalier – Columbia Pictures Corporation. Etats-Unis. 1948. Couleurs (Technicolor). 90 mn. Format image : 1.37 :1. VOST. VF.