1880, le capitaine Walsh (Reginald Gardiner) dirige l’escorte d’un convoi de vivres à destination du fort de Furnace Creek. En chemin, il reçoit l’ordre de son supérieur, le général Fletcher Blackwell (Robert Warwick), de rebrousser chemin et de laisser le convoi poursuivre seul. Cet ordre a de terribles conséquences… Les soldats du fort sont massacrés par les Indiens menés par le terrible Little Dog. Le général Blackwell est jugé en cour martial. Le choc est rude pour l’officier, et il décède subitement. Ses deux fils Cash (Victor Mature) et Rufe (Glenn Langan) en froid depuis des années décident, chacun de son côté, de laver l’honneur de leur père. Ils se mettent à la recherche du capitaine Walsh…
Massacre à Furnace Creek est un western classique au scénario des plus prévisibles mais grâce à un savoir-faire incomparable des studios hollywoodiens le film distille un vrai plaisir de spectateur. Tout d’abord grâce à son excellente distribution: tous les acteurs, des principaux aux plus petits rôles, sont parfaits, de vraies gueules de cinéma.
Victor Mature est un héros atypique dans le genre, son visage ne correspond pas à celui du cow-boy traditionnel. D’ailleurs, les dialogues ne se privent pas de s’en faire l’écho. Massacre à Furnace Creek est le deuxième western de la carrière de Victor Mature. Il succède au chef-d’œuvre de John Ford, La poursuite infernale (My Darling Clementine, 1946) où Mature incarne un Doc Holliday d’anthologie, Dandy alcoolique et tuberculeux. Mature est à l’époque l’image de la sur-virilité masculine. Il accède au vedettariat avec son rôle d’homme des cavernes dans Tumak, fils de la jungle (One Million BC, 1940) où ses pectoraux font merveille. C’est Josef von Sternberg qui le premier met en avant son charme trouble et pervers dans le vénéneux The Shanghai Gesture (1941). Sternberg en fait une sorte d’ « homme fatal » l’équivalent masculin de Marlène Dietrich. Quoi de plus normal alors de le retrouver par la suite dans de remarquables films noirs. Après le succès du western de Ford, la 20th Century Fox lui offre le rôle vedette de Massacre à Furnace Creek. C’est un western urbain taillé sur mesure pour l’acteur. Mature détestait monter à cheval, ce qui, dans l’univers des cow-boys, limitait ses personnages et rendait impossibles les escapades dans les grands espaces pour l’acteur.
Victor Mature est un acteur rare dans l’univers du western, à peine une petite poignée de films dont le formidable La Charge des tuniques bleues (The Last Frontier, 1955) d’Anthony Mann. Pour Massacre à Furnace Creek, il retrouve derrière la caméra H. Bruce Humberstone qui l’avait dirigé en 1941 dans le polar Qui a tué Vicky Lynn ? (I Wake Up Screaming ?, 1941). Bruce Humberstone n’est pas un auteur, c’est un réalisateur à la technique sûr qui sait parfaitement mettre en valeur sa vedette. Sa mise en scène des plus classiques fonctionne parfaitement. Il apporte un grand soin aux déplacements des personnages en arrière-plan comme dans les séquences du saloon ce qui rend ses plans particulièrement dynamiques et vivants. L’une des grandes qualités du film est sa description de la ville, des magouilles et de la mentalité de ces nouveaux riches. Il y a aussi quelques très belles séquences spectaculaires comme l’attaque du fort qui ouvre le film ou la poursuite dans la ville du Capitaine Walsh par un tueur à ses trousses. Avec son rythme sans temps mort, l’attention et l’intérêt du spectateur sont maintenus de bout en bout. Même si nous devinons le dénouement, ce qui compte c’est comment nous allons y parvenir. De ce point de vue, le scénario est une mécanique impeccable qui s’apparente parfois au polar. Par ailleurs, Massacre à Furnace Creek bénéficie d’une superbe photographie en noir et blanc d’Harry Jackson.
Massacre à Furnace Creek est un bel exemple d’une production de la grande époque des studios.
Fernand Garcia
Massacre à Furnace Creek est édité en DVD par Sidonis/Calysta dans la collection de référence du genre : Western de légende. Le film est disponible pour la première fois avec une piste sonore en version française. Cette édition spéciale bénéficie, comme l’ensemble des autres titres de la collection, d’une image et d’un son superbement restaurés. En complément : Patrick Brion analyse le film et rend hommage à Victor Mature (7 minutes). Enfin, une galerie de photos avec des dessins préparatoires et l’affiche américaine complètent cette très belle édition.
Massacre à Furnace Creek (Fury at Furnace Creek) un film de H. Bruce Humberstone avec Victor Mature, Coleen Gray, Glenn Langan, Reginald Gardiner, Albert Dekker, Fred Clark, Charles Kemper, Robert Warwick, George Cleveland, Roy Roberts… Scénario : Charles G. Booth. Dialogues complémentaires : Winston Miller. Inspiré par l’histoire de David Garth. Directeur de la photographie : Harry Jackson. Décors : Albert Hogsett – Lyle R. Wheeler . Montage : Robert L. Simpson. Musique : David Raksin. Direction musicale : Alfred Newman. Producteur : Fred Kohlmar. Production : 20th Century Fox. Etats-Unis. 1948. 88 minutes. Noir et blanc. Format image : 1.33 :1. Son VF et VO Sous-titrée français. Tous Publics.