En 1980, le porte-avions nucléaire, Nimitz, traverse une porte du temps et se retrouve à quelques heures de l’attaque japonaise sur Pearl Harbor.
Nimitz retour vers l’enfer est un film de science-fiction emblématique du début des années 80. Le scénario est particulièrement habille, l’interprétation est solide et des scènes – spectaculaires. A la réalisation on trouve Don Taylor, ex-acteur passé derrière la caméra. Bon technicien avec un réel sens du rythme et de la narration.
Don Taylor a fait ses classes à la télévision et a consacré la plus grande partie de sa carrière à la réalisation d’épisodes de série TV (Alfred Hitchcock présente, Les mystères de l’Ouest, Cannon, etc.) et à toute une série de téléfilms unitaires. Sur le grand écran, il s’est illustré avec talent dans le cinéma fantastique et de science-fiction. Ainsi, il succède à Franklin J. Schaffner et Ted Post pour le troisième volet de La Planète des singes : Les évadés de la planète des singes (Escape from the Planet of the Apes, 1971) avec Roddy McDowell et Kim Hunter. L’histoire « propulse » deux singes dans le passé, où ils se retrouvent dans un monde dominé par les hommes, l’inverse de la première histoire. Les évadés de la planète des singes est un film de transition un peu en deçà des autres épisodes de la série mais il n’en constitue pas moins un spectacle fort plaisant. Don Taylor se retrouve aux commandes d’une très bonne version du classique de H.G. Wells L’Ile du Dr. Moreau (The Island of Dr. Moreau, 1977). Il dirige Burt Lancaster dans le rôle du médecin fou, qu’il oppose à un excellent Michael York, naufragé sur l’ile, et à la magnifique Barbara Carrera, créature mi-femme mi-animal. Sa version soutient la comparaison avec celle de 1932 réalisée par Erle C. Keaton avec Charles Laughton. Ce succès lui permet de prendre les rênes de Damien, la malédiction 2 (Damien : Omen II, 1978) suite de La Malédiction (The Omen), énorme succès du cinéma d’horreur. Il dirige William Holden et Lee Grant confrontés à l’antéchrist. Sa mise en scène n’égale pas celle de Richard Donner ; à sa décharge, l’effet de surprise ne joue plus. Don Taylor suit à la lettre un script assez paresseux mais ponctué par d’excellentes séquences-chocs de morts violentes.
La principale qualité de Don Taylor est d’introduire le maximum de réalisme dans sa réalisation, crédibilisant ainsi ses histoires, traitement qu’il va appliquer avec succès à Nimitz, retour vers l’enfer.
Le scénario de Nimitz – retour vers l’enfer est particulièrement ingénieux. Les scénaristes exploitent intelligemment toutes les possibilités qu’une telle situation offre. Le commandant du USS Nimitz (Kirk Douglas) se retrouve confronté à un dilemme : doit-il intervenir ou non et changer le cours de l’histoire. La force de frappe du USS Nimitz étant sans commune mesure avec ce dont dispose alors la marine américaine et japonaise de l’époque. Le film exploite des faits réels comme la disparition du sénateur Samuel Chapman (Charles Durning), dont les scénaristes en font habillement l’un des personnages, avec son assistante (Katherine Ross), centraux du film. Le scénario ne manque pas d’humour et de situations cocasses (la radio des années 40, etc.) et quelques répliques amusantes, « Pourquoi la Marine a-t-elle donné le nom d’un officier en vie à son porte-avions ? ».
Quatre scénaristes sont crédités au générique entre autres David Ambrose et Gerry Davis. David Ambrose, féru de fantastique et d’histoires, passe sans problème d’un genre à l’autre en mélangeant parfois les deux comme dans Nimitz. Il est aussi bien l’auteur de l’excellent Survivant d’un monde parallèle (The Survivor, 1981), adaptation d’un roman fantastique de James Herbert pour David Hemmings, que de La Révolution Française, imposante fresque historique de Robert Enrico et Richard T. Heffron célébrant le bicentenaire de la Révolution en 1989. Quant à Gerry Davis, il est l’une des chevilles ouvrières de la célèbre série de science-fiction de la BBC Dr Who.
Formidable mécanique de science-fiction Nimitz, retour vers l’enfer est indéniablement un bel objet de propagande pour la Marine américaine. L’USS Nimitz est, aujourd’hui encore, l’un des plus grands et des plus puissants navires de guerre du monde. Sa devise est « Teamwork, a Tradition » (le travail d’équipe, une tradition) est parfaitement mis en valeur par le film. La mise en scène met à contribution l’équipage du porte-avions, ce qui apporte une touche de vérisme sans laquelle l’impact visuel du film eut été amoindri. Les scènes de lancement et de réception d’avions de combat et d’hélicoptère à partir du pont sont spectaculaires.
L’une des meilleures séquences du film est l’attaque du yacht et la rencontre entre deux avions de chasse « Tomcat » et deux chasseurs japonais « Zéro ». Elles combinent prises de vues réelles et maquettes avec une efficacité certaine. Les effets spéciaux sont excellents, ils ont le charme de l’époque. Le passage du porte-avion d’une époque à l’autre est une réussite visuellement intéressante. Une autre qualité est le plaisir que procurent des scènes tournées dans des décors réels : dans les airs, en mer, etc. et non dans l’irréalisme froid du numérique.
Nimitz, retour vers l’enfer est la dernière grosse production avec Kirk Douglas, à 64 ans, il est en pleine forme. Quelques semaines avant la sortie du film opposant américain et japonais, Kirk Douglas avait présidé le Festival de Cannes, où il avait récompensé deux chefs-d’œuvre : l’un Japonais, Kagemusha d’Akira Kurosawa et l’autre Américain, Que le spectacle commence (All That Jazz) de Bob Fosse ! Dans Nimitz, il partage l’affiche avec Martin Sheen tout juste sortie du chef-d’œuvre de Francis Ford Coppola, Apocalypse Now.
Kirk Douglas est impeccable dans un personnage taillé sur mesure et ce n’est pas la première fois que nous le retrouvons sur le pont d’un navire. Il est aussi, par le biais de sa société Byrna, le producteur du film, rôle qu’endosse son fils Peter Vincent Douglas. Acteur exigeant, caractériel et difficile, Kirk Douglas a produit plusieurs films de grande qualité dont le plus célèbre reste l’époustouflant Spartacus de Stanley Kubrick. Chose curieuse, le très déjanté Lloyd Kaufman, auteur, réalisateur, producteur et cofondateur de la Troma, société spécialisée dans le gore, le sexe et l’absurde, est crédité au générique comme producteur associé, ce qui au vu du classicisme du film de Don Taylor est assez incroyable !
Nimitz – retour vers l’enfer eut un beau succès en France et reste aujourd’hui encore un excellent spectacle de science-fiction.
Fernand Garcia
Nimitz – retour vers l’enfer est édité pour la première fois en DVD-Blu-ray par Sidonis – Calysta dans la collection Science-Fiction. Le film de Don Taylor bénéficie d’une édition spéciale du 25e anniversaire. La copie proposée est impeccable, la couleur et son sont restaurés, en compléments un documentaire américain sur l’attaque de Pearl Harbor.
Nimitz – retour vers l’enfer (The Final Countdown) un film de Don Taylor avec Kirk Douglas, Martin Sheen, Katherine Ross, James Farentino, Ron O’Neal, Charles Durning… Scénario : David Ambrose, Gerry Davis, Thomas Hunter et Peter Powell d’après une histoire de Thomas Hunter, Peter Powell et David Ambrose. Directeur de la photographie : Victor J. Kemper. Montage : Robert K. Lambert. Musique : John Scott. Producteurs associé : Lloyd Kaufman. Producteurs exécutifs : Richard R. St. Johns et John W. Hyde. Producteur : Peter Vincent Douglas. Production : The Byrna Company. Etats-Unis. 1980. 103 mn. Couleurs. Panavision. Format image : 2.35 :1 ratio 16/9e. DTS-HD. Tous Publics.