Brand New-U – Simon Pummell

Slater fête son anniversaire avec l’amour de sa vie, Nadia. Soudainement, un groupe d’intervention pénètre dans l’appartement et enlève Nadia. Slater ne peut retenir le commando et l’un des assaillants est tué. Pourtant les survivants repartent avec Nadia, laissant Slater désemparé seul avec le cadavre. Cherchant à comprendre, il retire le masque d’un cadavre et découvre le visage de Nadia…

Brand New-U

Brand New-U est un très beau et mélancolique film de science-fiction. De la science, il reprend toute la haute technologie qui nous traque, nous modèle en permanence et nous éloigne les uns des autres. De la fiction, il retient ce qui constitue l’épine dorsale d’un être humain, ses sentiments. Brand New-U est une entreprise tentaculaire, aseptisée et dont la fonction échappe au commun des mortels. Un Tout nouveau vous est ce que propose l’entreprise à ses clients. Mais qui sont ses clients ? Le film est l’histoire d’un homme qui ne désespère pas voir rejaillir un amour perdu. Pour fuir les accusations de la police du meurtre de sa petite amie, Slater accepte contraint et forcé de devenir un autre. Auto-persuasion et répétitions à l’infini de phrases sont sensées effacer son ancienne mémoire. Les traits de son visage sont modifiés par la chirurgie esthétique.  Slater entre dans un nouvel espace de vie, mais son moi intérieur se refuse à cette mascarade. L’entreprise œuvre pour le bien-être des individus. Les êtres n’ont plus que des besoins et ne doivent plus avoir de désirs. Mais la vie est autrement plus complexe qu’un programme informatique ou qu’une ligne de calcul. Slate croise « une autre Nadia » ou bien est-ce la même, toujours est-il que le sentiment fébrile de l’amour renaît. Nadia ne le calcule plus. Et le polaroid froissé, selfie des deux lors de la fatidique soirée d’anniversaire témoigne du lien entre eux. Elle ne reconnaît pas en Slater un hypothétique ancien amour… a-t-elle jamais été amoureuse ? Slater représente un danger pour une société à la recherche d’une perfection froide et sans sentiment.

Brand-New-U

Premier film de fiction parfaitement maîtrisé par son auteur, Simon Pummell. Nous sommes dans la science-fiction haut de gamme, l’on pense aux premiers films de David Cronenberg pour cet univers froid, les longs couloirs de la Brand New-U, à J.G Ballard pour la présence de gratte-ciel, de parking désert, d’une déshumanisation qui prend le pas sur l’homme, à Philip K. Dick pour la paranoïa qui conduit les hommes au bord du précipice. Mais très vite Pummell se dégage de toutes ses influences et prend majestueusement son envol. Brand New-U est sans conteste une œuvre personnelle dans laquelle le spectateur se doit d’entrer pour en apprécier les splendeurs. Quelques magnifiques séquences restent en mémoires bien longtemps après la projection, comme ces mouvements aériens dans les couloirs de la Brand New-U. La séquence du parking, ou fou de douleur, après une nouvelle séparation avec Nadia, Slater contacte Brand New-U. Conversation pathétique d’un homme et d’une machine à l’entrée de ce lieu sans vie. La scène d’amour entre Slater et Nadia est la séquence charnière dans une salle de bain, où leurs corps parfaits fusionnent dans une étreinte de la dernière chance. Les miroirs autour d’eux ne reflètent plus que des corps monstrueux, détruits par la douleur d’un impossible retour. Il faut louer l’intelligente utilisation des longes focales, aplatissant les corps dans les décors, leur enlevant toute possibilité de fuite. Et ce jeu de mise au point sur les personnages, les rendant présents et absents l’un à l’autre tout à la fois. La bande-son est remarquable jouant d’effet de bande magnétique, de voix perdues, d’ambiance froide, elle est une autre dimension du film. La musique de Roger Goula Sarda apporte ce qu’il faut de violence, de calme et de romantisme à cette œuvre singulière. Simon Pummell est un cinéaste à suivre avec attention.

Fernand Garcia

Brand New-U, un film de Simon Pummell avec Lachlan Nieboer, Nora-Jane Noone, Tony Way, Nick Blood, Andrew Buckley, Tim Faraday, Michelle Asante, Jacinta Mulcahy. Scénario : Simon Pummell. Directeur de la photographie : Reinier van Brummelen. Décors : Greg Shaw. Montage : Tim Roza. Musique : Roger Goula Sarda. Productrice : Janine Marmot. Production : Hot Property Films- Savage Productions – Rinkel Film – Illuminations Films – Finite Films – Art4noise. Grande-Bretagne-Irlande-Pays-Bas. Couleurs. 2,35 :1. 2015. 104 mn. Ouverture de L’Etrange Festival 2015.