Des astronautes reviennent d’un long voyage dans l’espace, sur la trajectoire les menant à la terre, dans les abords de Saturne, ils sont exposés à un champ radioactif d’une puissance phénoménale. Steve West (Alex Rebar) est le seul survivant de l’équipage du Saturne V. Arrivé dans un état critique, l’armée le maintient au secret dans un centre hospitalier. En reprenant conscience Steve se découvre dans un état hideux. Il est un monstre gélatineux et cannibale. Steve s’enfuit après avoir assassiné une infirmière (Bonnie Inch). Le Dr Ted Nelson (Burr DeBenning), ami de Steve, et le général Michael Perry, partent à sa recherche, tandis que les morts s’accumulent…
Si le scénario du Monstre qui vient de l’espace dans ses grandes lignes reprend le schéma narratif d’un classique de la SF, Le Monstre (The Quatermass Xperiment, 1955) de Val Guest, la première aventure du professeur Bernard Quatermass. D’autres évoque un démarquage d’un autre film de SF, Le pionnier de l’espace (First Man Into Space, 1959) de Robert Day. Pourtant, William Sacks a déclaré n’avoir pas vu ses films. « J’ai écrit le scénario en allant au Festival du film d’horreur de New York. Pour chaque film, j’ai noté les meilleurs scènes et les moments les plus effrayants, et je les ai incorporés dans mon scénario, une parodie des films d’horreur des années 50. » (in L’Ecran fantastique n° 26). Sa principale source d’inspiration est sans l’ombre d’un doute La nuit des morts-vivants de George A. Romero. L’attitude et l’itinéraire de ce pauvre astronaute évoquent celui d’un mort-vivant. La volonté de Williams Sacks était de faire du Monstre qui vient de l’espace une comédie noire dans l’esprit des EC Comics.
Le tournage ne va pas être de tout repos. « J’ai été constamment en guerre contre un des producteurs, au point que, à un certain moment, je n’ai plus pensé qu’à terminer le film. » La post-production vire au cauchemar, les producteurs décident d’orienter le film vers l’horreur pur en s’éloignant le plus possible de son aspect humoristique. Il en résulte des retakes et l’ajout de nouvelles scènes, réalisés ou non par Sachs, les choses ne sont pas claires. Tourné dans des conditions difficiles, dix-sept jours, avec un petit budget, le film de William Sachs est aujourd’hui un petit classique du genre.
Le Monstre qui vient de l’espace est un beau spécimen du cinéma fantastique de la fin des années 70 avec toutes les figures de style de l’époque. De longues attentes avant l’attaque du monstre, une jeune femme traquée dans une maison, des fausses pistes, de la tension (le chat, etc.) afin de faire sursauter le spectateur, un zeste d’érotisme (les seins nus du mannequin), et une petite dose d’humour trash. La formule tient la route et se regarde avec un brin de nostalgie et d’amusement plus de 40 ans après (le temps passe si vite). Non pas qu’entretemps, le film soit devenu génial, mais l’histoire d’un homme qui se liquéfie et finisse en une masse immonde dans une poubelle, est assez réjouissant. En réalité, ce qui a permis au Monstre qui vient de l’espace de passer à la postérité, ce sont les effets spéciaux de maquillage du grand Rick Baker.
L’astronaute, bien mal en point, fond au fur et à mesure de l’histoire, des parties de son corps tombent comme les feuilles mortes en automne. Un œil par-ci une oreille par-là, et même un bras (mais dans ce cas, il n’est pas « responsable ») jusqu’à finir en un tas de viande gélatineuse. Rick Baker était déjà un nom dans le domaine de FX de maquillage quand il accepte de participer au Monstre qui vient de l’espace. Il conçoit un corps d’où la chair se transforme en un liquide avec toutes sortes de couleurs, laissant entrevoir les os du crâne.
Maquilleur de FX de talent, Rick Baker est celui a permis à James Wood d’entrer sa main dans son ventre dans Videodrome de David Cronenberg. Il est aussi responsable de l’impressionnante transformation de Griffin Dunne en lycanthrope dans Le Loup-garou de Londres de John Landis, mais aussi de son concurrent Hurlements de Joe Dante. Scènes si impressionnantes que son nom reste attaché aux loups-garous, pourtant Rick Baker a une autre spécialité ; les singes. Il débute par celui de Schlock (1973) de John Landis puis King Kong (1976) de John Guillermin, Tanya’s Island (1980) d’Alfred Sole, Greystoke (1984) de Hugh Hudson, Gorilles dans la brume (Gorillas in the Mist, 1988) de Michael Apted, Mighty Joe Young (1998) de Ron Underwood et La planète des singes (Planet of the Apes, 2001) de Tim Burton. Sa création de l’homme qui se liquéfie à inspirer d’autres collègues maquilleurs et cinéastes, que ce soit dans Robocop ou Street Trash. Rick Baker quitte le tournage quelques jours avant la fin, pour se consacrer à la scène du bar de La Guerre des étoiles (Star Wars, 1977) de George Lucas. Rick Baker a été nommé 12 fois à l’Oscar et en a obtenu 7 (à ce jour), un record, pour Le Loup-garou de Londres, Harry and the Henderson, Ed Wood, The Nutty Professor, Men in Black, How the Grinch Stole Christmas et The Wolfman.
En 1977, Le Monstre qui vient de l’espace faisait le tour des festivals du genre en Europe, à la grande satisfaction des aficionados de l’horreur. Un long chemin en festival qui ne verra atterrir le film sur les écrans français qu’en 1981, soit quasiment quatre ans après son tournage. L’aspect gore (léger) du film est certainement la principale raison de sa distribution en France.
Avec son mélange de gore et de scènes à la lisière de l’absurde, Le Monstre qui vient de l’espace mérite un petit détour.
Fernand Garcia
Le Monstre qui vient de l’espace, est édité pour la 1er fois en DVD et combo (DVD + Blu-ray) par Sidonis – Calysta dans la collection « Cauchemar », dans un master HD impeccable. En complément : Deux bande annonce et un livret : La peau, les os et tout le reste par Marc Toullec, accompagne cette édition. Le critique de Mad Movies revient sur le parcours singulier de William Sachs et le tournage épique du Monstre qui vient de l’espace, une mine d’informations (24 pages).
Le Monstre qui vient de l’espace (The Incredible Melting Man), un film de William Sachs avec Alex Rebard, Burr DeBenning, Myron Healey, Michael Alldredge, Ann Sweeny, Lisle Wilson, Rainbeaux Smith (Cheryl Smith), Julie Drazen, Bonnie Inch, Jonathan Demme… Directeur de la photographie : Willy Curtis (Willy Kurant). Décors : Michel Levesque. Effets spéciaux de maquillage : Rick Baker. Effets spéciaux : Harry Woolman. Montage : James Beshears. Musique : Arlon Ober. Producteur exécutif : Samuel Z. Arkoff (non crédité). Producteurs : Max J. Rosenberg – Samuel W. Gelfman. Production : Rosenberg – Gelfman. Etats-Unis. 1977. 86 minutes. Couleur. Pellicule 35 mm. Format image : 1.85 :1. Son : Version originale avec ou sans sous-titres français et Version française. DTS-HD. Interdit aux moins de 16 ans (en son temps).