Un vaisseau extraterrestre dans l’espace infini. Dans une pièce, Supersonic (Richard Yesteran), plongé dans le profond sommeil biostase, est réveillé par ses chefs. Il doit accomplir une nouvelle mission : aller sur la terre afin d’identifier ceux qui mettent la planète en danger et menace l’équilibre de la galaxie. Supersonic s’envole aussitôt en direction de la Terre…
Supersonic Man entre dans la catégorie des curiosités apparues dans le sillage de Superman (1978) de Richard Donner. Contrairement à la superproduction des Salkind, Juan Piquer Simón ne dispose que moyens financiers extrêmement limités pour donner vie à son super-héros. L’enthousiasme que l’on décèle à presque chaque séquence comme s’il s’agissait d’une victoire sur des éléments déchaînés, rend l’aventure terrestre de Supersonic Man, sympathique et c’est d’un regard indulgent et amusé que l’on suit le film. Le super-héros ne s’appelle Supersonic Man que sur l’affiche puisque tout le long du film, il n’est que Supersonic. Un procès avec les producteurs de Superman, lui fait même perdre le « Super » dans certains pays pour devenir Sonicman.
Supersonic Man est un rêve de film de super-héros de Juan Piquer Simón, sa volonté de faire vivre une aventure de bande-dessinée sur le grand écran. Juan Piquer Simón est un réalisateur espagnol, un amoureux de cinéma populaire, des films de science-fiction, fantastique et du merveilleux. Il va durant toute sa carrière se consacrer à ses genres de prédilection. Il réalise son premier film, Le Continent fantastique (Viaje al centro de la Tierra), une adaptation cheap et kitsch du Voyage au centre de la terre de Jules Verne. En 1979, il n’y avait quasiment pas de super-héros sur les écrans. Supersonic Man date d’une époque où une petite production pouvait sortir sur les écrans du monde entier, dans les salles de quartier ou consacrer aux doubles programmes. Le film change non seulement de titre suivant les pays, mais aussi de musique passant d’une composition « classique » à du disco ! Le distributeur français coupe de son côté les passages comiques de l’ivrogne, certainement pour faire film sérieux !
Juan Piquer Simón fait comme il peut avec ce qu’il a, frôlant le ridicule avec une naïveté confondante. Les pouvoirs de Supersonic Man sont limités par le budget riquiqui de la production. Ainsi, il transforme les armes de ses adversaires en bananes ! Comme son modèle de la planète Krypton, Supersonic Man a une force démentielle ainsi, il soulève un compacteur, dans un effet spécial des plus rudimentaires, l’engin de chantier se transforme en une silhouette en carton. Supersonic Man est un bricolage comme on les aime. Il suffit d’y croire. Le plus intéressant est le robot tueur du méchant Dr Gulik (Cameron Mitchell), sorte de boîtes métalliques assemblées, avec roquettes et lance-flammes. Une machine tueuse à la hauteur du héros.
En faisant le strict minimum, Cameron Mitchell, est le meilleur acteur du film. Il est évident que l’ensemble de ses scènes a été tourné en quelques jours, son cachet pour la production a dû représenter pour la production l’équivalent de celui de Marlon Brando pour Superman. Mitchell enchaîne les films et téléfilms des deux côtés de l’Atlantique.
Michael Coby joue le super-héros dans la vie réelle. Acteur italien, « spécialisé » dans les copies des films du duo Terence Hill-Bud Spencer, incarnant le double de Terence Hill dans une série de productions : Mon nom est Trinita (Carambola, 1974), Trinita, nous voilà (Noi non siamo angeli, 1975) ou Pour Pâques ou à la Trinita (Il vangelo secondo Simone e Matteo, 1976). On le retourne toutefois dans de petits rôles chez de grands cinéastes : Alberto Lattuada (La Cigala, 1980), Michael Winner (La dernière victime/Scream for Help, 1984), Federico Fellini (Intervista, 1987), Jerzy Skolimowski (Les eaux printanières, 1989). Dans Supersonic Man, Michael Coby abhorre une belle moustache qu’il abandonne dès qu’il endosse le costume du super-héros. En même temps, rien de plus normal puisqu’il s’agit d’un autre acteur, le culturiste espagnol Richard Yesteran, le Tarzan ibérique dans deux productions du début des années 70 : Tarzan y el misterio de la selva (1973) et Tarzan y el tesoro Kawana (1975). Il endosse le costume à paillettes après avoir joué totalement nue dans la production classifiée « S » (sûrement pour sexe) en Espagne : El maravilloso mundo del sexo (1978), où, avec la scandaleuse et icône de la révolution sexuelle Susana Estrada, il égrène le chapelet de toutes les positions du Kamasoutra. Dans Supersonic man, il garde son slip.
Supersonic Man, amusant nanar, connaît une seconde vie en comics, hélas, il ne reviendra pas sur le grand écran… mais peut-être qu’un jour, il réapparaîtra dans le ciel… It’s a bird… It’s a plane… It’s who ?!!
Fernand Garcia
Supersonic Man, une édition Artus Films dans la sympathique collection pop Ciné Fumetti, le film est proposé dans sa version intégrale (les scènes absentes de la version française sont en italien sous-titrées en français). En complément de programme : Le tournage de Supersonic Man par Christian Lucas. De la création à la sortie du film en passant pas son tournage, jusqu’à la pérennité de Supersonic Man, de quoi être imbattable sur le super-héros (16 minutes). Juan Piquer Simón par Christian Lucas, un véritable connaisseur de l’œuvre de JP Simón pour une évocation, riche en anecdotes, sur l’ensemble de la carrière du cinéaste espagnol : « ni créateur, ni copieur, il se voyait comme un contributeur, un passeur ». Piètre directeur d’acteur, passionné par les effets spéciaux et fasciné par le cinéma américain, JP Simón représente un pan du cinéma Bis espagnol. « …les films de Juan Piquer Simón sont des plaisirs coupables bien agréables à regarder aujourd’hui », de quoi « reconsidérer son œuvre » (29 minutes). Un diaporama des superbes (et sexy) affiches du film et des photos d’exploitation sur la BO disco de Supersonic Man, et enfin, la bande-annonce américaine (3 minutes).
Supersonic Man/Sonicman un film de Juan Piquer Simón avec Michael Coby (Antonio Cantafora), Cameron Mitchell, Richard Yesteran (José Luis Ayestarán), Diana Polakow, John Caffarel (José Maria Caffarel), Frank Brana, Javier Cameos, Tita Garcia… Scénario : Tonino Moi et Juan Piquer Simón. Directeur de la photographie : Juan Mariné. Direction artistique et Effets spéciaux : Emilio Ruiz et Francisco Prosper. Effets optiques : Jack Elkoubi. Costumes : Gonzalo Gonzalo. Montage : Pedro del Rey. Musique : Gino Peguri. Producteur : Dick Randall, Faruk Alatan et Tonino Moi (et non crédité : Juan Piquer Simón). Production : Spectacular Trading – Almena Film. Espagne-Italie. 1979. 84 minutes. Supercolor, Eastmancolor. Dinavision. Format image : 1,85 :1. 16/9e. Son : Version originale avec sous-titres français et Version française. Tous Publics.