La section Paysage propose cette année un panorama du meilleur du cinéma coréen d’aujourd’hui en 11 films : des films de genre aux films d’auteurs, des films commerciaux aux films indépendants en passant par des documentaires passionnants.
A DISTANT PLACE (2020) de Park Kun-young
Jin‑woo élève des moutons dans un ranch à Hwacheon. Le fermier partage cette paisible existence avec Joong-man, le propriétaire du ranch, sa fille Moon-kyeong et la jeune Seol. Ensemble, ils forment une famille discrète et appréciée. Jusqu’au jour où une arrivée inattendue va bouleverser la quiétude de la communauté.
A Distant Place décrypte avec pudeur les conflits intérieurs qui tourmentent chacun des personnages. Dans un monde où l’homme est un loup pour l’homme, avec A Distant Place, Park Kun‑young témoigne d’une recherche de l’harmonie et parvient à traduire avec grâce toute la complexité du rapport à l’autre et à soi-même. A l’image de celle d’un western moderne, épurée et soignée, la mise en scène fait progressivement surgir une réalité à facettes multiples. Grâce à un minutieux travail visuel et sensoriel, Park Kun‑young démontre à chaque instant que voir n’est pas regarder. Alternant recul et proximité, pudique, la caméra s’attarde alors à représenter le dicible et l’indicible, saisissant dans la beauté grandiose des paysages, la pureté des personnages et dans le lyrisme des sentiments l’impossibilité de trouver sa place et les siens.
Né à Séoul en 1984, Park Kun-young est diplômé en littérature et cinéma. Il a réalisé les courts-métrages Swing (2013), Post (2014) et Silent Boy (2015) avant de passer au long en 2016 avec To My River. A Distant Place est son deuxième long-métrage.
Première française, A Distant Place sera projeté au Festival du Film Coréen à Paris le samedi 30 octobre à 12h15 et le lundi 1er novembre à 20h.
A LEAVE (2020) de Lee Ran-hee
Jae-bok est l’un des meneurs d’une grève avec occupation des lieux après le licenciement massif des employés par son entreprise. Après cinq ans de lutte et un procès perdu, les trois grévistes restants décident de faire un « break » et de retourner chez eux pour quelques jours. Le retour au foyer, auprès de ses deux filles adolescentes, se révèle bien difficile pour Jae-bok.
Dans la lignée du cinéma de Ken Loach, A Leave est un drame social brut et passionnant qui pose la question de l’après-combat et montre les conséquences et les difficultés d’un retour au présent, d’un retour à la réalité. Lee Ran-hee nous montre les différentes strates qui sédimentent l’existence d’un homme qui, en donnant tout pour la justice, a fait imploser son foyer dans une impasse sans issue. La finesse du trait et les nombreux silences des acteurs dressent un portrait très noir de la situation du travail en Corée du Sud.
Née en 1971, Lee Ran-hee a étudié l’anglais et la littérature. Ayant commencé sa carrière comme actrice au sein de la compagnie théâtrale Han River dans les années 90, elle a réalisé son premier court-métrage, A Perm, en 2006. A Leave est le premier long-métrage qu’elle réalise.
Première européenne, A Leave sera projeté au Festival du Film Coréen à Paris le jeudi 28 octobre à 12h30 et le samedi 30 octobre à 19h20.
CORYDORAS (2021) de Ryu Hyung-seok
Park Dong-su vit dans son propre appartement après toute une vie passée dans des établissements spécialisés du fait de son handicap lourd. Son quotidien est espacé par l’écriture de ses poèmes, publiés et reconnus, ses jeux vidéos et ses poissons, qu’il chérit tout particulièrement.
Sélectionné au Festival international du film de Jeonju en 2021, documentaire doux et puissant dont la poésie et la beauté dépassent le cadre de l’image, Corydoras nous présente un homme handicapé vivant seul dans un appartement de Séoul. Corydoras se place avec sobriété au-dessus des jugements trop évidents sur les handicaps lourds de Dong-su pour souligner la place dominante que prend l’écriture de la poésie dans sa vie et l’émancipation que cela lui permet. Le film intensifie ainsi l’imaginaire inouï d’une personne qui, malgré la douleur, rêve et vit, sans jamais perdre le sourire. Dong-su est prisonnier de son corps mais cela ne l’empêche pas de vivre aussi vite et fort qu’il le peut. Si le regard du cinéaste s’efface derrière son sujet, le film ne fait pas l’économie de la difficulté du quotidien de Dong-su, la caméra restant au plus près de lui et de ses préoccupations journalières, dans une intimité touchante et belle à la fois.
Né à Ulsan en 1988, Ryu Hyun-seok est diplômé en cinéma de l’université Sungkyunkwan et de l’Université Nationale des Arts de Corée. En 2018, il avait déjà réalisé le documentaire The Evanescent Relief.
Première européenne, Corydoras sera projeté au Festival du Film Coréen à Paris le jeudi 28 octobre à 15h et le dimanche 31 octobre à 12h.
HOMELESS (2020) de Lim Seung-hyeun
Go‑woon, Han‑gyeol et leur nouveau‑né Woo‑rim sont à la rue. Enchaînant sans fin les petits boulots pour s’en sortir, ils dorment dans des saunas, des hôtels miteux, des salles de jeux, n’importe où. Alors quand la vieille dame chez qui Han‑gyeol fait régulièrement des livraisons quitte sa maison pour un mois, la jeune famille y pose ses valises et y accroche ses espoirs d’une vie meilleure.
Lim Seung‑hyeun fait partie des quelques cinéastes qui ont su montrer les sans-abris hors des stéréotypes et des personnages de troisième ordre. Derrière l’intrigue semi-autobiographique du cinéaste montrant comment survivent au quotidien les plus précaires, les oubliés, Homeless résonne comme un récit social puissant et implacable, dénonçant une société indifférente envers les plus démunis. La mise en scène et le montage énergiques de Homeless réussissent à transformer le récit sordide du quotidien en un véritable thriller social. En insinuant le doute et l’angoisse dans l’esprit des personnages, Lim Seung‑hyeun maintient l’attention et la tension jusqu’au bout de son récit, associant le spectateur au vacillement de ces jeunes parents qui se tiennent constamment au bord du gouffre. Marqué par l’urgence, premier film brillant et remarquable d’authenticité de Lim Seung-hyeun, Homeless est son film de fin d’étude.
Lim Seung-hyeun a étudié le cinéma à l’école du film de l’université Dankook. Avant de passer au long-métrage avec Homeless, il avait réalisé les courts A Lucky Day (2013), Stop&Start (2015) et The Monster (2016).
Première française, Homeless sera projeté au Festival du Film Coréen à Paris le vendredi 29 octobre à 12h30 et le dimanche 31 octobre à 21h30.
MOVING ON (2020) de Yoon Dan-bi
Okju, son petit frère Dongju et leur père emménagent chez leur grand-père à la fin de l’année scolaire. Les visites de la tante des enfants se font de plus en plus fréquentes et elle vient finalement, à son tour, s’installer dans la maison familiale. Au fil de l’été, enfants et petits‑enfants doivent prendre des décisions difficiles pour l’avenir de la famille.
L’une des forces de Moving On réside dans la capacité de la réalisatrice Yoon Dan‑bi à faire jaillir l’émotion des silences et du quotidien des vacances dont les jours s’égrènent doucement vers une fin inévitable. En épousant la forme délicate du conte, le scénario s’appuie sur des petits détails « insignifiants » pour former son histoire. Toute l’action du film ou presque tient dans l’enceinte de la maison du patriarche. Fluide, la mise en scène utilise remarquablement la séparation des espaces pour exprimer ce qui segmente et ce qui unit les trois générations vivant sous le même toit. Avec une lumière particulièrement soignée et des cadres précisément définis, Yoon Dan‑bi évite soigneusement les passages obligés du genre et parvient à dresser un magnifique portrait familial empli d’espoirs et de désillusions. Nous montrant cette famille qui va devoir réapprendre à vivre ensemble, Moving On est un film qui cherche à arrêter le temps qui passe et à rattraper celui à jamais perdu. Magnifique exploration de la famille, Moving On est un des films coréens les plus récompensés en festivals.
Née en Corée en 1990, Yoon Dan-bi s’est fait remarquer avec le court-métrage Fireworks en 2015. Elle est entrée à l’école du film de l’université Dankook en 2017. Moving On est son premier long métrage.
Première française, Moving On sera projeté au Festival du Film Coréen à Paris le jeudi 28 octobre à 17h40 et le vendredi 29 octobre à 20h10.
OUR MIDNIGHT (2020) de Lim Jung-eun
Alors que ses proches ont depuis longtemps abandonné leurs rêves, Ji-hoon espère toujours vivre de son métier d’acteur. Mais au lieu de cela, il enchaîne les petits boulots. Un ami lui en propose justement un nouveau, assez étrange : arpenter les ponts la nuit pour empêcher les gens de sauter. C’est ainsi qu’il fait la rencontre d’Eun-young…
Il y a quelque chose d’infiniment poétique qui se dégage de la balade nocturne à laquelle nous convie Our Midnight. Ji-hoon et Eun-young, nos deux protagonistes, se baladent la nuit à travers les rues de Séoul, dans cette immense ville endormie où les ombres, les temples et les souvenirs prennent soudain vie sous les yeux émerveillés de deux adultes perdus qui, l’espace de quelques instants, retrouvent le regard plein d’espoir des enfants. Le « Minuit » qui leur appartient illumine le film et, comme par magie, rend l’espoir possible.
Née en 1990, Lim Jung-eun a étudié la production à l’université Konkuk et la réalisation à l’université Dankook. Après les courts Weight Of Love (2015), The Claw Machine (2017) et Dawn To Dawn (2018), Our Midnight est son premier long-métrage.
Première française, Our Midnight sera projeté au Festival du Film Coréen à Paris le mercredi 27 octobre à 14h45 et le lundi 1er novembre à 18h.
ROLLING (2021) de Kwak Min-seung
Ju-ri ne quitte plus beaucoup son appartement depuis le début de la pandémie de Covid-19. Son quotidien morne est interrompu par sa mère, qui doit aller rendre visite à sa grand-mère malade. Elle demande alors à Ju-ri de la remplacer dans son restaurant de quartier, et de confectionner ses fameux kimbaps.
Un des premiers films coréens à intégrer la pandémie mondiale de Covid-19 à son récit, Rolling marque la rencontre du cinéma avec l’actualité. C’est pourtant une comédie légère et délicate que réalise Kwak Min-seung avec cette histoire d’une jeune femme d’une vingtaine d’années qui nous montre l’importance de redonner du sens à notre quotidien. En aidant sa mère dans son petit restaurant de kimbaps, Ju-ri reprend une socialisation arrêtée par la crise sanitaire, renouant avec les autres dans les petits détails du quotidien qui créent du lien et du sentiment. Drôle et attachant, Rolling est un film qui fait un bien fou.
Né en 1986 à Jeonju, avant de signer Rolling, son premier long-métrage, Kwak Min-seung a réalisé les courts Mirae et Lucky Ball.
Première internationale, Rolling sera projeté au Festival du Film Coréen à Paris le jeudi 28 octobre à 21h et le dimanche 31 octobre à 19h25.
SHORT VACATION (2020) de Kwon Min-pyo et Seo Hansol
Quatre collégiennes se voient confier un devoir d’été par le professeur qui s’occupe du club de photographie dont elles sont les uniques membres : immortaliser « la fin du monde ». La bande de copines décide de prendre le métro et de partir à l’aventure tout au bout de la ligne 1, voir si cela ressemble à la fin du monde…
Short Vacation est un voyage qui nous emmène sur les traces de cette période de la vie où l’on ne se sent plus vraiment enfant mais où on n’est pourtant pas encore adulte. Cette période où tout semble possible et où l’amitié permet d’appréhender le monde et la vie. Ce premier film, à travers le regard de ses quatre héroïnes qui sont le cœur du film, nous fait partager leur joie, leur ennui, leur complicité et leurs mésaventures. Criant de vérité et plein d’humour, Short Vacation est une aventure humaine à hauteur de ces adolescentes.
Short Vacation est le premier long-métrage de Seo Hansol, né en 1991. Également né en 1991, Kwon Min-pyo a réalisé le court-métrage Heat Wave en 2017 avant Short Vacation qui est aussi son premier long-métrage.
Première française, Short Vacation sera projeté au Festival du Film Coréen à Paris le vendredi 29 octobre à 15h00 et le lundi 1er novembre à 12h.
TEN MONTHS (2020) de Namkoong Sun
Mi‑rae poursuit avec ambition sa carrière de développeuse de jeux vidéo dans une start‑up. Déterminée et indépendante, rien ne semble pouvoir arrêter son ascension… jusqu’au jour où elle découvre qu’elle est enceinte. Cette grossesse accidentelle va bouleverser sa vision du monde, mais aussi radicalement changer la façon dont la société la perçoit.
Inspiré de la propre grossesse de la réalisatrice, Ten Months est une comédie humaine qui brosse le portrait d’une héroïne drôle et attachante en prise avec le chaos le plus total. « Chaos » est d’ailleurs le nom que Mi‑rae donne au bébé qui grandit en elle et qui devient la définition même de sa vie. Namkoong Sun chronique donc la grossesse rocambolesque de Mi‑rae avec un recul salvateur qui évite le pathos et parvient tout de même à donner à son récit une vision plus ambivalente, en écho avec le désordre que vit le personnage. Comme cette grossesse, le comique dans Ten Months surgit à l’improviste et cette variation des tons qu’utilise brillamment la réalisatrice permet au film d’être à la fois léger et profond.
Née en 1980, Namkoong Sun a étudié le cinéma à l’Université Nationale des Arts de Corée. Elle a travaillé sur de nombreux films et réalisé cinq courts-métrages avant de réaliser Ten Months, son premier long-métrage.
Première française, Ten Months sera projeté au Festival du Film Coréen à Paris le mercredi 27 octobre à 12h et le samedi 30 octobre à 21h30.
VOICE OF SILENCE (2020) de Hong Eui-jeong
Deux hommes servent de « nettoyeurs » pour un gang de malfrats. Ils disposent des corps torturés et nettoient les scènes de crimes comme de simples manutentionnaires. Un jour, on leur demande de garder une petite fille enlevée, le temps de récolter la rançon. Mais tout ne se passe pas comme prévu…
Remarqué dans Burning de Lee Chang-dong, Yoo Ah-in incarne ici un employé du crime pas comme les autres dont l’humour noir et caustique, apporte une douceur inattendue au film et lui permet ainsi de déjouer nos attentes et de parler d’un sujet difficile comme l’enlèvement d’enfant sans être lourd ou pesant. Ce décalage est également appuyé par l’esthétique étonnamment lumineuse du film qui permet à la réalisatrice d’effectuer une critique acerbe de la société coréenne. Film noir à l’atmosphère singulière, Voice of Silence sort du cadre.
Diplômée de l’Université Nationale des Arts de Corée et de la London Film School, Hong Eui-jeong a travaillé plusieurs années dans la publicité et les clips avant de réaliser le court-métrage Habitat en 2018. Voice of Silence est son premier long-métrage.
Première française, Voice of Silence sera projeté au Festival du Film Coréen à Paris le mercredi 27 octobre à 20h35 et le lundi 1er novembre à 17h15.
YOUNG ADULT MATTERS (2021) de Lee Hwan
Se-jin, 18 ans, n’aime rien tant que déambuler sur son skate pour oublier les problèmes qui s’accumulent autour d’elle. Sa rencontre avec Ju-yeong, 18 ans elle aussi, et deux garçons plus âgés va bouleverser son quotidien. C’est l’été et le quatuor va se mettre en quête d’argent, quitte à prendre des risques…
Trois ans après Park Hwa-young, Lee Hwan prolonge son œuvre et confirme avec Young Adult Matters qu’il place au cœur de celle-ci la thématique d’une jeunesse en perdition. Une jeunesse marginale qui ne parvient pas trouver sa place dès lors qu’elle sort du cadre établi par la société coréenne. Si la violence peut surgir à n’importe quel moment, l’atmosphère estivale et le jeu de contraste formel du film rendent lumineux ce deuxième long métrage de Lee Hwan. Avec son esthétique particulièrement soignée, la lumière et les couleurs du film transcendent la noirceur de son sujet. Intense, Young Adult Matters est également porté par l’envoutante interprétation aérienne de son actrice Lee Yoo-mi qui est ici magnétique.
Diplômé de l’université Daejin, Lee Hwan a commencé sa carrière comme acteur, s’illustrant au théâtre et au cinéma, avant de réaliser les courts-métrages Bull Shit (2011) et Home (2013). Son premier long-métrage, Park Hwa-young, a été projeté au FFCP en 2018.
Première française, Young Adult Matters sera projeté au Festival du Film Coréen à Paris le mercredi 27 octobre à 17h15 et le lundi 1er novembre à 20h30.
Allant du blockbuster au film d’auteur indépendant, la sélection très alléchante de cette seizième édition du Festival du Film Coréen à Paris met une fois encore à l’honneur un cinéma à l’exception culturelle singulière. Par sa diversité, son éclectisme et sa richesse, cette nouvelle édition s’annonce déjà exceptionnelle. N’hésitez plus! Venez découvrir le meilleur du cinéma coréen d’aujourd’hui et de demain !
Afin de ne rien manquer de cet évènement, rendez-vous au Publicis Cinémas du 26 octobre au 2 novembre.
Steve Le Nedelec