Garçon manqué, passionnée par la musique, le mouvement punk, les camions et la CB, Cebe (Linda Manz) est une enfant perturbée qui vit seule avec sa mère toxicomane, après que son père alcoolique ait été emprisonné pour cinq ans après une collision avec un car de ramassage scolaire qui a coûté la vie à de nombreux enfants alors qu’il roulait dans son camion avec elle. Cebe veut vivre et oublier les blessures du passé. Quand son père est libéré, à nouveau réunie, la famille rêve et tente de reprendre une vie normale, mais les problèmes refont rapidement surface…
Né le 17 mai 1936 à Dodge City, Kansas, Etats-Unis, Dennis Hopper est un acteur réalisateur, mais aussi peintre et photographe, qui a fait ses débuts aux côtés de James Dean à l’affiche de La Fureur de Vivre (Rebel Without a Cause, 1955) de Nicholas Ray et de Géant (Giant, 1956) de George Stevens. Il poursuit ensuite une honorable carrière d’acteur de second plan lorsqu’en 1966 il joue dans The Trip, écrit par Jack Nicholson et réalisé par Roger Corman. Hopper travaille également sur le film en tant que deuxième assistant réalisateur. Ce dernier sympathise avec la bande de Roger Corman au sein de laquelle il rencontre entre autres Peter Fonda et Nicholson. En 1969, Hopper réalise son premier long métrage et interprète aux côtés de Peter Fonda et de Nicholson l’un des rôles principaux d’Easy Rider qui devient très vite culte et le symbole culturel de l’Amérique hippie. En sélection officielle et en compétition au Festival de Cannes en 1969, Easy Rider recevra le Prix de la Première œuvre.
Lâché par Universal, Hopper sera anéanti par la distribution catastrophique et l’échec commercial de The Last Movie (1971), son précédent et deuxième film en tant que réalisateur qu’il tourne après le succès d’Easy Rider (1969). Ce dernier va se perdre dans l’alcool et la drogue et mettra près de dix ans avant de revenir à la mise en scène avec Out of the Blue, son troisième long métrage. Figure emblématique et incontestable de la contre-culture américaine, Dennis Hopper décèdera des suites d’un cancer en mai 2010, peu de temps après avoir inauguré son étoile sur Hollywood Boulevard.
Out of the Blue est un film à petit budget tourné au Canada mais dont l’action se situe aux Etats-Unis. A l’origine du projet, Dennis Hopper n’était censé qu’interpréter le rôle du père incestueux de la jeune fille qui devait être sauvée par un psychiatre bienveillant. Le personnage du psychiatre, interprété par Raymond Burr, devait être le personnage principal du film et le narrateur de l’histoire en voix off. Scénariste du film, c’est Léonard Yakir qui doit également en assurer la réalisation. Catastrophé par les rushes tournés par Yakir, le producteur exécutif Paul Lewis fait appel à Hopper pour reprendre les rênes du tournage. De retour depuis peu sur le devant de la scène grâce à ses rôles dans L’Ami Américain (Der amerikanische Freund, 1977) de Wim Wenders et Apocalypse Now (1979) de Francis Ford Coppola, mais alors encore au creux de la vague dans sa carrière de cinéaste, Hopper accepte la proposition de reprendre le projet avec les conditions financières qui lui sont imposées, à savoir tourner le film en quatre semaines et en assurer le montage en six. Jugeant inutilisable ce qui a été tourné jusque-là, Hopper décide tout de même de relever le défi et en profite pour réécrire complètement le scénario. Plutôt que de raconter l’histoire d’un drame familial d’un point de vue extérieur, celui-ci va en effet faire le choix de suivre le personnage de Cebe dans sa descente aux confins de la folie et réduire le rôle du psychiatre à deux courtes séquences. Il va ajouter dans l’histoire la passion de Cebe pour la musique et donner un rythme unique au film avec une chanson qu’il a entendu à la radio et qu’il adore. Hopper décide également de laisser aux comédiens la liberté d’improviser sur le tournage. Enfin, ce dernier choisira de changer la fin du film qui au départ devait être positive et optimiste. Au vu du portrait terriblement désenchanté et effrayant que fait Hopper de l’Amérique profonde et de son traitement radical, on ne peut que constater le gouffre qui sépare le film, devenu explosif, de son projet initial jugé trop lisse et convenu par le cinéaste. Tourné dans l’urgence avec énergie et sincérité, Out of the Blue est un film choc qui prend le spectateur aux tripes plus que par les sentiments.
Out of the Blue, littéralement « sorti du bleu », est une expression anglaise désignant un évènement soudain et inattendu que l’on pourrait traduire par « à l’improviste » ou « sans crier gare ». L’idée du thème principal de la bande originale mais aussi celle du titre du film viennent au cinéaste en écoutant la chanson My My, Hey Hey (Out of the Blue) de Neil Young.
« My My, Hey Hey (Mon Mon, Hey Hey)
Rock and roll is here to stay (Rock’n’roll est là pour durer)
It’s better to burn out (Il vaut mieux brûler vivement)
Than to fade away (Que de s’éteindre à petit feu)
…
It’s out of the blue and into the black (Ce n’est pas prévu, et c’est dans le noir)
They give you this, but you pay for that (Ils te donnent ceci, mais tu paies pour cela)
And once you’re gone you can never come back (Et une fois parti, tu ne peux plus revenir)
When you’re out of the blue (Quand tu n’es pas prévu)
And into the black (Et dans le noir)
The King is gone but he’s not forgotten (Le roi est parti, mais il n’est pas oublié)
This is the story of a Johnny Rotten (C’est l’histoire d’un Johnny Rotten)
It’s better to burn out than it is to rust (Il vaut mieux brûler vivement que de rouiller)
The king is gone but he’s not forgotten. (Le roi est parti, mais il n’est pas oublié.)
…
Rock and roll can never die (Rock’n’roll ne pourra jamais mourir)
There’s more to the picture (Il y a plus dans une image)
Than meets the eye (Que ce que l’œil y voit.)
… »
Extrait de la chanson My My, Hey Hey (Out of the Blue), de Neil Young (1979).
Principale source d’inspiration du réalisateur pour la réalisation du film, My My, Hey Hey (Out of the Blue) est une chanson lancinante et désespérée dont la musique imprègne tout le film de sa mélancolie et dont le texte est à l’image de l’état d’esprit de Cebe (Linda Manz), la jeune punkette héroïne du film. Les paroles de la chanson de Neil Young illustrent magistralement le propos du film et les pensées de Cebe. Comme le dit la chanson, Cebe préfère « exploser que de s’éteindre à petit feu ». Cette dernière fait également référence dans son texte à Elvis Presley ainsi qu’à Johnny Rotten qui sont les deux idoles de Cebe dans le film. Comme l’illustraient déjà merveilleusement ses précédentes réalisations, l’utilisation brillante que fait Hopper de la musique sur le film nous offre des moments d’une poésie remarquable. Comme tous les adolescents, Cebe cherche les réponses des questions qu’elle se pose sur le monde dans les paroles des chansons. Sans discours, les paroles des chansons du film suffisent à nous informer de l’état d’esprit, du caractère et des questions que se posent la jeune héroïne. Les paroles nous disent tout ce qu’il faut savoir sur l’histoire et les personnages.
Empreint d’une esthétique caractéristique du cinéma américain des années 70 de laquelle émane un sentiment de liberté naturel et de démesure, Out of the Blue nous offre à la fois de purs moments d’improvisation et des plans séquences minutieusement préparés. Classique dans son déroulé dramaturgique, jusqu’au-boutiste dans sa forme et son traitement, dénué de tout espoir avec ses personnages laissés-pour-compte de la société qui brûlent leurs vies, Out of the Blue est un film très sombre et nihiliste parsemé de scènes fortes et percutantes. Marqué par un réalisme brut, le travail accompli sur la lumière par le directeur de la photographie Marc Champion, qui a officié sur de nombreux films documentaires, influence la saisissante esthétique du film et participe à faire plonger le spectateur au cœur même de la tourmente. Le travail sur le cadre rappelle quant à lui les travaux que Dennis Hopper a effectués comme photographe au début des années 60 quand il témoignait des évolutions de la société et de la culture américaine. Rythmée par les paroles et les musiques des titres de la bande originale, la singularité de la mise en scène de Dennis Hopper réside dans le fait d’alterner, voir même de faire cohabiter subtilement les scènes chocs et les scènes indubitablement poétiques dont le film regorge. A l’image du personnage de Don (Dennis Hopper) qui, récemment employé dans une décharge publique, incapable d’accepter de perdre son nouveau travail à cause de son passé, va, sans penser au lendemain, précipiter sa chute en détruisant le bureau de son patron avec son bulldozer, la mise en scène d’Hopper symbolise une irrépressible pulsion frénétique de destruction, d’autodestruction.
Même dans les scènes les plus « calmes » et les situations quotidiennes les plus anodines, clichées de l’« American way of life », les personnages échouent à se conformer aux codes du monde auquel ils aimeraient appartenir et restent perpétuellement à la limite de l’implosion ou de l’explosion. Imprévisibles, ceux-ci peuvent « déraper » à n’importe quel moment. Toujours à la limite de la rupture, les personnages permettent de maintenir le film et les spectateurs dans un état de tension permanente. Cebe erre en ville alors que sa mère, Katie (Sharon Farrell), junkie paumée, s’adonne à la drogue. Don conduit sa petite famille pour un pique-nique à la plage à bord de sa vieille décapotable mais il fait froid et celui-ci n’apporte que du pop-corn et de la bière pour l’occasion. Entre ses deux parents dans la voiture, Cebe ne cherche qu’à profiter du moment présent mais le trauma de l’accident qui a brisé la famille est toujours présent et la peur d’un nouvel accident gagne Katie. Tandis que Cebe cherche maladroitement à devenir un copain pour son père, ce dernier a à son égard des marques d’affection pour le moins équivoques. Tel une incarnation démoniaque, le personnage de Charlie (Don Gordon) et son influence négative sur Don empêche ce dernier de passer à autre chose et de s’en sortir. Ensemble, ils ne font que se saouler, s’enfoncer dans le désespoir et le cauchemar de leurs vies ratées. Charlie condamne Don à rester le même. Il condamne le couple à oublier ses rêves de bonheur. Charlie condamne la famille au malheur.
Pathétiques, tous les faits et gestes des personnages traduisent leur inconséquence et ne font qu’accélérer le cours tragique de leur existence et précipiter leur perte. Victimes de la société qui a fait d’eux des monstres, ils n’ont plus aucune notion morale. Par le biais de l’échec toujours présent et des rapports ambigus que partagent les personnages, une violence sourde menace sans cesse d’exploser.
Comment se fait-il qu’en dépit du temps les personnages d’Out of the Blue demeurent les mêmes ? Probablement car aucun pouvoir, aussi grand soit-il, ne peut changer le cours du temps. A moins que cela ne soit parce que le temps n’existe pas… D’habiles montages parallèles, avec notamment la scène de l’accident qui ouvre le film, ou encore le personnage de Charlie, l’ami de Don, nous indiquent que le passé hante toujours le présent et menace sans arrêt l’avenir des personnages. Habités par leurs démons intérieurs et rongés par leurs erreurs, les personnages n’échapperont pas à la violence de leur passé. Un passé d’autant plus insurmontable que l’on apprendra finalement que le trauma originel est autre et bien plus horrible que l’accident qui a coûté la vie à de nombreux enfants et valu une lourde peine de prison à Don. Le spectateur comprend que le trauma originel se situe en fait au niveau de la sphère intime de la cellule familiale. Condamnés par leur passé, ils n’ont aucun avenir et n’échapperont pas à leur destin. Il n’y a pas de rédemption possible pour eux.
Agressif, le discours que fait Cebe au début du film dans la carcasse de la semi-remorque accidentée de son père, a la forme d’un discours punk et annonce l’inévitable drame. Fan d’Elvis et de Johnny Rotten des Sex Pistols, Cebe a les cheveux gominés et porte le cuir de son père. Sa passion pour cette musique qui symbolise une Amérique déchue est une échappatoire à l’insupportable et insurmontable douleur du passé. Pour elle, il faut détruire, tuer les hippies. No future ! Out of the Blue illustre parfaitement le message du slogan brandi à l’époque par les punks et le portera à son paroxysme. No future pour les vieux hippies ! No future pour les jeunes punks !
Devenus alcooliques et toxicomanes, les personnages de Don, Katie et Charlie pourraient bien être le prolongement de ce qu’auraient pu devenir les anciens hippies que nous présentait Easy Rider. Odieux, ignobles, répugnants, violents, minables, d’une tristesse à vous glacer le sang, les personnages d’Out of the Blue n’ont pas grand-chose pour eux. Ce sont des antihéros englués dans leur morne quotidien qui ne manquent pas d’évoquer ceux que l’on croise dans Série Noire (1979) réalisé par Alain Corneau avec Patrick Dewaere, Bernard Blier, Myriam Boyer, Marie Trintignant et Jeanne Herviale. Le spectateur erre dans un cauchemar poisseux peuplé de personnages médiocres qui témoignent de la déliquescence du monde et ne peut que les détester. Dominés par leur environnement quotidien, les personnages semblent résignés ou étrangers au monde qui les entoure. Abandonnés par la vie, prisonniers de leur condition sociale, ils ont baissé les bras et accepté leur quotidien autodestructeur sans même chercher à se battre ou se poser la moindre question. Pour eux, le sordide est la norme. Victimes du mépris, de la rancœur, des carcans sociaux, des rapports de force ou encore du manque d’argent, les personnages du film portent tous en eux les contradictions du monde qui les entoure. C’est la société qui les bâillonne, les rend incapable de s’exprimer, de s’accomplir, de s’épanouir ou de s’intégrer. Les personnages et leurs vies témoignent du dangereux dysfonctionnement de notre société. Comme elle se plaint et ne comprend pas pourquoi ses idoles l’ont abandonnée, on comprend que seule Cebe n’acceptera pas d’être abandonnée par la vie. Cebe n’acceptera pas l’avenir qui l’attend ou comprendra qu’elle n’en a aucun.
Permanente, l’atmosphère sombre et menaçante du film doit autant à son esthétique qu’à l’ambiguïté des personnages. Au diapason de la forme et du discours du film, les interprétations des comédiens sont tout simplement exceptionnelles. Malgré leurs rôles particulièrement difficiles à jouer, tous ici sont extraordinaires de justesse et de vérité. La complexité des personnages du film, tout sauf manichéens, mais aussi le fait que le réalisateur ne soit jamais dans le jugement, pourra fortement déranger les spectateurs habitués au cinéma formaté et outrancièrement moralisateur d’aujourd’hui.
Contemporain de sa réalisation et à l’image de sa jeune héroïne qui tente de faire table rase du passé, refuse de se plier aux autorités institutionnelles, comme d’obéir à sa mère, et qui cherche continuellement à faire voler en éclat l’ordre établi, Out of the Blue est un film que l’on pourrait qualifier, toute proportion gardée, de punk. Le personnage de Cebe, adolescente pleine de colère et de révolte qui sombre dans la folie morbide et destructrice, est formidablement incarnée à l’écran par la jeune Linda Manz remarquée dans Les Moissons du ciel (Days of Heaven, 1978) de Terrence Malick aux côtés de Richard Gere, Brooke Adams et Sam Shepard et également à l’affiche du film Les Seigneurs (The Wanderers, 1979) réalisé par Philip Kaufman. Remarquable, Linda Manz plonge corps et âme dans son personnage et porte le film. Son impressionnante présence retranscrit parfaitement le caractère, la rage et l’état-limite de son personnage. Le cinéaste accompagne de manière magnifique le personnage de Cebe dans son quotidien, dans sa marche, dans sa fuite en avant et sa chute inéluctable. Un quotidien composé principalement d’endroits (squats, bars, quartiers) glauques et sinistres. D’incroyables plans séquences, nous montrent Hopper la suivre et la filmer dans ses errances avec de longs travellings sublimes qui, quelque part, annoncent ceux d’Elephant (2003) de Gus Van Sant. Étonnement, Linda Manz, à qui le talent promettait une grande carrière, disparaîtra presque complètement des écrans après ce film. Linda Manz est morte en août dernier des suites d’un cancer à l’âge de 58 ans.
Face à elle, les autres comédiens ne sont pas en reste. Les personnages secondaires, tous des minables flamboyants, sont eux aussi servis par de fabuleuses interprétations. En effet, si Out of the Blue confirme le talent manifeste de Dennis Hopper pour la mise en scène, toute aussi remarquable, à la fois tendre et effrayante, son interprétation du personnage de Don, le père égoïste et alcoolique irrécupérable, est d’une vérité stupéfiante. Tantôt rassurant, tantôt effroyable, à la fois ange et démon, Hopper parvient magnifiquement à retranscrire l’ambiguïté et la complexité du personnage de Don. Un personnage excessif à la nature autodestructrice qui pour son interprète fait office de catharsis. Notons également que Don est un personnage dont la violence et la perversité ne manquent pas d’évoquer le personnage de Frank Booth qu’Hopper interprétera quelques années plus tard dans Blue Velvet (1986), chef-d’œuvre réalisé par David Lynch.
Charlie, le personnage le plus abject du film, est magnifiquement interprété par Don Gordon que l’on a pu voir à l’affiche de Bullitt (1968) de Peter Yates aux côtés de Steve McQueen et Jacqueline Bisset, ou encore Papillon (1973) de Franklin J. Schaffner avec à nouveau Steve McQueen et Dustin Hoffman. Katie, l’irresponsable mère héroïnomane est quant à elle admirablement interprétée par Sharon Farrell que l’on a vu dans Le Monstre est Vivant (It’s Alive, 1974) de Larry Cohen ou encore Le Diable en Boîte (The Stunt Man, 1980) de Richard Rush avec Peter O’Toole et Barbara Hershey.
Sélectionné et en compétition au Festival de Cannes, Out of the Blue annonçait le retour inattendu de Dennis Hopper cinéaste. Malheureusement, à sa sortie aux Etats-Unis, le côté glauque et malsain d’Out of the Blue a provoqué une violente réaction de rejet. Cet accueil a eu de graves conséquences sur la carrière du film à l’étranger et notamment en Europe. Présenté dans des versions mutilées et censurées, partout, le film sortira dans l’indifférence totale. Out of the Blue sortira sur les écrans en France sous le titre Garçonne. Sans soutient de la presse, celui-ci passera inaperçu mais obtiendra un succès d’estime. Après Out of the Blue, Dennis Hopper rentrera dans le rang et réalisera des œuvres de manière plus conventionnelle comme Colors (1988) avec Sean Penn et Robert Duvall, Hot Spot (1990) avec Don Johnson, Jennifer Connelly et Virginia Madsen, ou encore Une Trop Belle Cible (Catchfire, 1990) avec Jodie Foster, Dean Stockwell, Joe Pesci, Vincent Price et John Turturro, dans lequel il joue également.
Après Easy Rider et The Last Movie, Out of the Blue peut être considéré comme le dernier volet d’une trilogie. A l’image même du parcours et de la carrière de Dennis Hopper, Out of the Blue marque l’aboutissement tragique d’une liberté utopique amorcée par Easy Rider. La révolution tant espérée n’a pas eu lieu. Désillusion pour la génération hippie. Désillusion pour la génération punk. Out of the Blue sonne la fin des rêves et des idéaux. Out of the Blue sonne la fin d’une époque. Mais aussi la fin d’une époque pour le cinéma. La fin d’une liberté artistique. Désillusion pour Dennis Hopper. Mais, si Out of the Blue marque une rupture, la fin d’une première période dans la carrière de metteur en scène de Dennis Hopper, il reste néanmoins l’un des meilleurs films de son auteur.
Fataliste et radical dans sa forme comme dans son traitement, Out of the Blue est un film noir, un drame sans concession qui, par son constat d’échec, dynamite à la fois l’« American way of life » et l’« American dream ». En montrant la misère et le désespoir en face, Out of the Blue détruit les mythes. Témoin de son époque, Out of the Blue est un film comme on n’en voit malheureusement que trop peu aujourd’hui. Un film brutal, puissant et inspiré qui pousse le spectateur dans ses derniers retranchements. Un film intelligent dans sa forme esthétique, sa mise en scène et son discours. Un film qui interroge et dérange. Un film qui choque et bouscule. Un film qui ose. Un film singulier. Un film d’auteur. Un film nécessaire. Du grand cinéma. Culte.
Steve Le Nedelec
Out of the Blue est disponible en combo (Blu-ray et DVD) chez Potemkine, restauration 4K, avec en complément : Commentaire audio de Dennis Hopper, John Alan Simon et Paul Lewis. Interview de Dennis Hopper par Tony Watts (1984, 93′). Entretien avec Jean-Baptiste Thoret et Elizabeth Karr au Montclair Film Festival (2020, 30′). Entretien avec Jean-Baptiste Thoret (46′).
Out of the Blue (Garçonne) un film de et avec Dennis Hopper et Linda Manz, Sharon Farrell, Raymond Burr, Don Gordon, Eric Allen, Fiona Brody, David L. Crowley, Carl Nelson, Jim Byrnes… Scénario : Leonard Yakir, Brenda Nielson (Dennis Hopper et Gary Jules Jouvenat non-crédité). Directeur de la photographie : Marc Champion. Décors : Leon Ericksen. Montage : Doris Dyck. Musique : Tom Lavin. Producteurs : Jean Gontier, Gary Jules Jouvenat, Leonard Yakir. Production : Discovery Productions – Robson Street. Distribution (reprise – France) : Potemkine Films (reprise 2021). Canada. 1980. 96 minutes. Couleur. Panavision. Format image : 1.85 :1. Son : Version originale sous-titrée en français. DTS-HD MA. 2.0. Mono. Interdit aux moins de 12 ans. Sélection officielle – Festival de Cannes 1980.