En pleine guerre de Sécession, Jesse James (Audie Murphy) n’a qu’un but: rejoindre le drapeau noir du colonel William Quantrill (Brian Donlevy) et de son armée de hors-la-loi. Il a soif de vengeance après l’assassinat de ses parents par des Red Legs. Jesse James entraîne avec lui son frère Frank (Richard Long), les frères Younger, Cole (James Best), Jim (Dewey Martin), et Kit Dalton (Tony Curtis). A Lawrence, une petite ville du Kansas, ils sont pris à partie par une population à cran. Le groupe ne doit son salut qu’à l’intervention d’un capitaine Yankee (Richard Arlen). En chemin pour rejoindre Quantrill, Jesse James fait la connaissance de Kate Clarke (Marguerite Chapman), sans savoir qu’elle est la femme du terrible Colonel Quantrill…
Kansas en feu a toutes les qualités des westerns de série B: efficacité du scénario, excellents acteurs, mise en scène inspirée et sens du rythme. Le film de Ray Enright est un vrai plaisir de cinéma. La star du film, Audie Murphy, enchaîne les tournages, Kansas en Feu est, avec Le Kid du Texas (The Kid From Texas) et Sierra, son troisième western produit par Universal à sortir en 1950. Son interprétation de Jesse James est digne d’éloge, ce n’est pas un héros, mais un jeune homme un peu perdu qui se cherche une figure paternelle et qu’il trouve auprès de Quantrill.
Jesse James est révolté contre l’injustice qui a frappé et tué ses parents. A la violence, il veut répondre par la violence, faire rendre gorge aux responsables, aux unionistes. Et qui les combattent ? Les guérilleros de Quantrill. Jesse James va rejoindre le colonel Quantrill et faire le douloureux l’apprentissage de la vie. Quantrill n’est qu’une ordure. Jesse James refuse de voir ce qui se passe sous ses yeux, les exécutions expéditives, les pillages… La propre femme de Quantrill, Kate le met en garde, mais l’attachement qu’il a envers le colonel (autoproclamé) est bien trop fort. Dans ce déferlement de violence, Jesse James découvre l’amour, il devient l’amant de Kate, une femme mariée, ce qui est pour le moins osé à l’époque. Mais c’est un amour froid, sans passion, Kate est plus âgée que Jesse James, ce qui est encore moins fréquent. Mais le film ne va pas au-delà d’un baiser et des mains enlacées.
Kansas en feu ne suit pas la vérité historique, mais se garde bien de faire de Quantrill un héros, c’est un monstre, il est présenté comme tel par sa femme, et à l’image cela ne fait aucun doute. La vie humaine n’a aucune valeur pour lui. Dans son camp, c’est une succession d’exécution sommaire. Un pauvre paysan qui s’est opposé à son armée de dégénérés après le massacre de sa famille est froidement abattu dans le dos. Les soldats capturés sont exécutés après une parodie de procès présidé par Quantrill. Il ment sans vergogne à Jesse James sur ses intentions et se délecte de la violence qu’il initie et encourage. L’argent finalement, il s’en moque tant que l’adrénaline de la violence et l’odeur de la poudre l’entourent.
Quantrill n’est absolument pas mort de la manière dont le film décrit ses derniers instants. Jesse James s’aveugle au sujet de Quantrill contrairement à ses acolytes, les frères Youger et Kit Dalton, qui ont bien compris où ils mettaient les pieds. Cette vie de hors-la-loi ne leur déplaît absolument pas. Quantrill est une figure de l’histoire de la guerre de Sécession pour le moins controversée. A la tête d’une horde de guérilleros, il est responsable de vols, de hold-ups, de pillages, de tueries, soi-disant en soutien au général Lee. Le point ultime de ses exactions est le massacre des habitants de la ville de Lawrence. Un acte d’une barbarie et d’une gratuité absolue.
Quantrill est incarné par Brian Donlevy, il est trop âgé par rapport au véritable personnage (mort à 27 ans), mais dans le cadre de la dramaturgie mise en place c’est payant, l’ascendant et la fascination qu’il exerce sur Jesse James sont ainsi plus faciles à mettre en place. Donlevy sera de nouveau Quantrill, en 1953, pour Allan Dwan dans le formidable La femme qui faillit être lynchée où cette fois sa femme, plus jeune, est incarnée par Audrey Totter.
Marguerite Chapman est excellente dans le rôle de Kate, sorte de Mirs. Robinson avant l’heure, on en vient même à regretter qu’elle n’ait plus de scènes. Dans un rôle secondaire, Tony Curtis, en début de carrière, – tout juste une petite dizaine de films – incarne un jeune compagnon de route de Jesse James, Kit Dalton. Il n’a pas beaucoup de scènes qui le mettent en valeur, mais il a une vraie présence à l’écran. Tony Curtis tourne pour la deuxième fois avec Audie Murphy puisque la même année, ils étaient partenaires dans Sierra, autre western signé par Alfred E. Green. Les deux acteurs sont sous contrat avec Universal.
Dans le cadre étroit d’un petit budget, Ray Enright fait au mieux avec ce qu’il a, et s’en sort fort honorablement. Le technicolor est éclatant, et la très belle scène de bataille dans les marais qui ouvre Kansas en feu est un « recyclage » du Sang de la terre de George Marshall. Le matte painting de la ville de Lawrence, quoique sommaire, et assez beau. Sa mise en scène du combat au couteau est particulièrement efficace et Audie Murphy des plus convaincants.
Kansas en feu est un pur western de série B, c’est-à-dire un pur plaisir de cinéma tout simplement.
Fernand Garcia
Kansas en feu est édité dans la collection Western de légende de Sidonis Calysta, le master HD est superbe. En bonus, une présentation de ce film « très séduisant » par Patrick Brion (11 minutes). Un portrait d’Audie Murphy, « le soldat le plus décoré de la Seconde Guerre mondiale » toujours par Patrick Brion (5 minutes) et la bande-annonce originale de Kansas en feu (2’13).
Kansas en feu (Kansas Raiders), un film de Ray Enright avec Audie Murphy, Brian Donlevy, Marguerite Chapman, Scott Brady, Tony Curtis, Richard Arlen, Richard Long, James Best, Dewey Martin, Richard Egan, John Kellogg, David Wolfe… Scénario : Robert L. Richards. Directeur de la photographie : Irving Glassberg. Décors : Bernard Herzbrun et Emrich Nicholson. Costumes : Bill Thomas. Montage : Milton Carruth. Musique : Milton Rosen. Producteur : Ted Richmond. Production : Universal International Pictures. Etats-Unis. 1950. 80 minutes. Technicolor. Format image : 1.37 :1. 16/9e. Son VOSTF. Tous publics.
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