Ágoston (Sándor Terhes) est licencié après avoir travaillé des années dans une centrale électrique. Sa vie est monotone, avec sa femme et sa fille, les liens se sont distendus. Il répond à une annonce et quitte la Slovaquie pour la Lettonie, mais une fois sur place les choses ne se passent pas vraiment comme prévu…
Le premier plan du film: un filet de pêche dans la mer est du meilleur effet, car subitement nous reviennent en mémoire les images hallucinantes du fabuleux Leviathan de Lucien Castaing-Taylor et Véréna Paravel. Out s’ouvre avec force sur un monde en crise. Ágoston, et d’autres, est licencié au cours d’une séquence qui fait froid dans le dos (cadre remarquable). Ses relations avec sa femme et avec sa fille sont entrées dans une zone d’incompréhension. Il quitte la Slovaquie pour s’en aller travailler en Lettonie dans un port de la mer Baltique, mais dans ce monde tout n’est qu’arnaque, – comme l’annonce à laquelle il répond -, et « gentille » corruption, à l’instar de la secrétaire défenseure des animaux.
Ágoston est « out », sa situation économique le met en marge de la société, comme dans l’histoire de son rêve de pêcher, paisiblement. Ce démarrage constitue la meilleure partie de cette première réalisation. Comme si la situation de départ, la précarité et tout ce qui s’en suit, n’était pas suffisant aux yeux du réalisateur György Kristóf. Il va tenter d’être original à tout prix en plongeant son protagoniste dans des situations plus absurdes les unes que les autres. A force d’accumulation, le film glisse lentement vers un cul-de-sac d’où surgissent les clichés. Il en va ainsi du russe, rencontre d’un moment, qui porte en lui tous les fantasmes du cinéma occidental envers ce type de personnage. Comme il se doit, il est alcoolique, violent, m’as-tu vu, etc. et vit avec une blonde botoxée à outrance.
En poussant vers l’absurde, György Kristóf détourne l’intérêt de son film pour se focaliser sur l’anecdotique. Il y avait pourtant matière: le déracinement d’Ágoston (il est Hongrois, vivant en Slovaquie, errant en Lettonie), la difficulté d’exprimer ses sentiments au sein du couple, celle de communiquer avec l’autre (la profusion des langues), la mise en concurrence des travailleurs, etc. Dommage. Petit à petit, nous finissons par nous désintéresser de la quête d’Ágoston.
Pas de doute, Out est bien dans le moule du cinéma d’auteur européen – des intentions floues, rejet d’un social revendicatif et in fine l’esquisse d’un retour dans la société. Un film qui laisse le spectateur dans le même état que lapin empaillé.
Fernand Garcia
Out un film de György Kristóf avec Sándor Terhes, Eva Bandor, Judit Bárdos, Ieva Norvele Kristóf, Guna Zarina, Viktor Nemets, Ieva Aleksandrova-Eklone, Tibor Gáspár… Scénario : György Kristóf,Eszter Horváth, Gábor Papp d’après une idée de György Kristóf. Image : Gergely Pohárnok. Décor : Branislav Mihálik. Montage : Adam Brothánek. Musique : Miroslav Tóth. Producteurs : Marek Urban, Ferenc Pusztai, Jiří Konečný. Production : Sentimentalfilm. Coproduction : KMH Film, Endorfilm, Mirage Film,Punkchart Films, RTVS, Famu, Film Angels Productions. Distribution (France) : Arizona Distribution (sortie le 2 août 2017). Slovaquie-Hongrie-République Tchèque. 2017. 88 minutes. Couleur. Format image : 2,39 :1 scope. Son : 5.1. Tous Publics. Sélection : Un Certain Regard, Festival de Cannes, 2017.